Cet article est le deuxième d’une série de deux consacrés à l’augmentation du soutien au Parti Québécois. Le premier article explique comment cette croissance du soutien au PQ n’est pas liée à un regain en popularité de l’option souverainiste.
Le surprenant regain de popularité du Parti Québécois n’est pas attribuable à un soutien croissant à la souveraineté. Mais de nombreux Québécois s’identifient néanmoins comme étant principalement souverainistes. Qu’est-ce qui sous-tend cette préférence ? Au-delà d’une préférence évidente pour la souveraineté, quelles sont les opinions qui les distinguent des autres Québécois ?
Cette différence ne vient d’une divergence d’opinions sur les grands défis politiques du moment. Sur les soins de santé, le logement abordable et l’environnement, il n’y a pas de grand fossé. Ce n’est pas non plus une vision différente du rôle de l’État. Ce qui caractérise les souverainistes sont principalement les griefs à l’égard de notre système fédéral, associés à un fort sentiment d’identité, comme le montre notre enquête 2024 de la Confédération de demain.
En ce qui concerne les soins de santé, environ un Québécois sur deux n’a pas confiance en sa capacité d’obtenir un traitement ou une consultation dans un délai raisonnable. Cette proportion est la même pour ceux qui s’identifient principalement comme souverainistes et ceux qui s’identifient principalement comme fédéralistes.
Quant à l’enjeu du logement, à peu près la même proportion de Québécois (un peu moins d’un sur deux) désapprouve la façon dont la province gère l’accessibilité. Mais, encore une fois, il n’y a pas de différence d’opinion entre ceux qui s’identifient comme souverainistes et ceux qui ne le sont pas.
Le même schéma persiste sur le plan environnemental. Les souverainistes et les fédéralistes se répartissent plus ou moins également entre ceux qui sont d’accord et ceux qui ne sont pas d’accord pour dire que la protection de l’environnement est plus importante que la protection des emplois, par exemple.
Au-delà de ces questions sur un enjeu en particulier, peut-être que les souverainistes québécois sont plus pro-gouvernementaux, plus favorables à l’État (du moins l’État provincial) en tant qu’outil pour faire avancer les objectifs collectifs ? Cela ne semble pas être le cas non plus.
En fait, les Québécois qui s’identifient principalement comme souverainistes sont un peu plus susceptibles que la moyenne de préférer des gouvernements plus petits ou le statu quo plutôt que des gouvernements plus importants qui offrent plus de services. De plus, les souverainistes sont plus enclins que les fédéralistes à penser que les gouvernements ont un impact négatif sur la vie de la plupart des gens. À l’inverse, les fédéralistes ont tendance à considérer l’impact des gouvernements comme positif.
Le plus intéressant est peut-être le fait que la distribution sur le spectre de l’idéologie gauche-droite est presque identique chez les souverainistes que chez les fédéralistes. Dans les deux groupes, environ la moitié se situe au centre, un quart à gauche et un quart à droite.
Ce qui distingue les souverainistes sont leurs points de vue sur deux autres enjeux.
Le premier d’entre eux est évident : le fédéralisme. Les souverainistes sont beaucoup moins convaincus des mérites du système fédéral canadien. Les souverainistes sont deux fois plus susceptibles que la moyenne québécoise d’être en désaccord avec le fait que le fédéralisme offre plus d’avantages que d’inconvénients pour leur province.
Une forte majorité de souverainistes estime que le Québec n’a pas la part d’influence qui lui revient dans les décisions nationales et qu’il ne reçoit pas sa juste part des dépenses fédérales. Trois souverainistes sur quatre (75 %) sont favorables à un transfert des pouvoirs d’Ottawa à Québec, alors que la moyenne provinciale est de 42 %.
Le second enjeu qui distingue les souverainistes des autres Québécois a trait à l’identité, avec des éléments de fierté et de mécontentement. La plupart des Québécois sont attachés à leur province, mais les souverainistes sont beaucoup plus susceptibles de s’y sentir fortement attachés (72 %) que la moyenne provinciale (44 %). Quarante-trois pour cent des souverainistes s’identifient comme Québécois uniquement – plutôt que comme Québécois et Canadien – , plus du double de la moyenne provinciale, qui est de 17 %.
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De nombreux souverainistes considèrent par ailleurs que ce fort sentiment d’identité québécoise est rejeté par le reste du Canada. Dans l’ensemble, 30 % des Québécois ne sont pas d’accord pour dire que leur identité culturelle est respectée dans le Canada d’aujourd’hui. Pour les souverainistes, c’est 52 %.
À l’inverse, 40 % des Québécois sont tout à fait d’accord pour dire que leur culture est mal comprise par le reste du Canada. Pour les souverainistes, c’est 67 %. Enfin, près de neuf souverainistes sur dix (88 %) affirment que la langue française au Québec est menacée.
L’importance de l’identité dans le soutien à la souveraineté ne surprendra pas ceux qui connaissent le mieux le mouvement souverainiste ou la politique québécoise. Mais les dirigeants politiques canadiens feraient bien de garder cela à l’esprit à l’approche des élections fédérales prévues pour octobre 2025.
À l’heure actuelle, la plupart des points chauds dans les relations fédérales-provinciales concernent la taxe fédérale sur le carbone (qui ne s’applique pas au Québec en raison de son système de plafonnement et d’échange), ou l’utilisation du pouvoir de dépenser pour faire avancer les priorités fédérales.
Mais les promesses et les politiques dans ces domaines ne sont probablement pas ce qui déterminera si le soutien à la souveraineté augmentera dans la province, en particulier dans l’éventualité où le PQ reviendrait au gouvernement. Ce sont les réactions du gouvernement fédéral (et du reste du Canada) aux questions liées à la langue et à l’identité qui seront déterminantes. Cela ne veut pas dire rester coi, au contraire, cela implique que de faire comme si ces questions n’existaient pourrait s’avérer comme la pire des options.
Détails méthodologiques
Les enquêtes de la Confédération de demain sont des études annuelles menées par une association regroupant certains des principaux organismes de recherche socio-économique et de politique publique du pays : l’Environics Institute for Survey Research, le Centre d’excellence sur la Fédération canadienne, la Canada West Foundation, le Centre d‘analyse politique – Constitution Fédéralisme, le Brian Mulroney Institute of Government et le Conseil de gestion financière des Premières nations.
Les enquêtes permettent aux Canadiens de s’exprimer sur les grandes questions qui façonnent l’avenir de la fédération et de leurs communautés politiques.
L’étude 2024 a interrogé 6 036 adultes entre le 13 janvier et le 13 avril (82 % des réponses ont été recueillies entre le 17 janvier et le 1er février), 94 % des réponses ayant été recueillies en ligne. Les autres réponses ont été recueillies par téléphone auprès de personnes vivant dans le Nord ou dans les réserves des Premières nations.
Les résultats présentés ci-dessus sont basés sur des sondages réalisés auprès de 1 621 Québécois, dont 1 297 francophones.
Les réponses à l’enquête sont pondérées en fonction de l’âge, du sexe, de la région, du niveau d’éducation, de l’identité autochtone et de la langue parlée à la maison, afin d’être représentatives de la répartition réelle de la population adulte canadienne.
Dans un discours qui a beaucoup fait parler lors du Conseil national du Parti québécois à la mi-avril, Paul St-Pierre Plamondon a ramené à l’avant-plan la question de l’indépendance du Québec.
Estimant possible l’élection d’un gouvernement péquiste en 2026, le chef du PQ a laissé entendre que son ascension au poste de premier ministre serait accompagnée d’un référendum sur la souveraineté. Cela représenterait pour les Québécois l’ultime chance « de se donner une pérennité linguistique et culturelle ».
Et nous voilà repartis sur une question que l’arrivée au pouvoir de la CAQ avait évacuée des tribunes! Avec une maigre récolte de trois sièges à l’élection provinciale de 2022, plusieurs avaient enterré le Parti québécois. Son quasi-effacement de la scène politique signifiait certainement que le sempiternel débat sur la souveraineté du Québec pouvait enfin être clos.
Deux ans plus tard, les sondages d’opinion au Québec témoignent d’un spectaculaire revirement de situation. Si des élections avaient lieu aujourd’hui, le PQ finirait en tête, avec environ 33 % du vote. Mieux, en raison de la division de l’électorat québécois en cinq partis, le PQ pourrait même former un gouvernement majoritaire, pour la première fois en plus de 25 ans.
Tout ceci nous amène à reparler de référendum. La résurgence du PQ annonce-t-elle un regain du soutien à la souveraineté dans la province ?
En un mot : non.
La proportion de Québécois francophones qui s’identifient comme « principalement souverainistes » a très peu changé au cours des six dernières années (soit la période couverte par les sondages annuels de la Confédération de demain).
Actuellement, 23 % des Québécois francophones se décrivent comme étant principalement souverainistes. C’est plus que la proportion de ceux qui se disent principalement fédéralistes (18 %), mais pas très différent des années précédentes. Une proportion légèrement supérieure (29 %) se situe entre les deux options, et 23 % disent n’être ni l’un ni l’autre.
La même tendance se dégage lorsqu’on demande aux Québécois s’ils pensent que la souveraineté du Québec est une idée dépassée. À l’heure actuelle, un Québécois francophone sur deux (51 %) est de cet avis, une proportion similaire à ce qui était observé au début de cette série de sondages en 2019, mais aussi au moment où la question a été posée pour la première fois dans le sondage, il y a plus de 20 ans.
Entre-temps, les variations s’expliquent par une faible diminution des Québécois en désaccord avec l’énoncé, au profit des indécis.
Le tableau n’est pas plus encourageant pour le mouvement souverainiste si l’on considère spécifiquement les opinions des jeunes adultes. Seulement 16 % des Québécois francophones âgés de 18 à 34 ans se disent principalement souverainistes, et seulement 26 % ne pensent pas que la souveraineté du Québec est une idée qui a fait son temps.
Dans les deux cas, ces proportions sont inférieures à celles des générations plus âgées, mais également à celles du même groupe d’âge il y a vingt ans. Les Québécois millénariaux et ceux de la génération Z sont donc moins souverainistes que ceux de la génération X ou des baby-boomers au même âge.
Même les partisans actuels du Parti québécois ne sont pas tous principalement souverainistes. Les partisans du PQ (53 %) sont plus susceptibles de s’identifier comme principalement souverainistes que ceux de la CAQ (18 %), par exemple. Mais 39 % des partisans du PQ disent se situer entre les deux options ou n’adhérer ni à l’une, ni l’autre, alors que 7 % se considèrent principalement fédéralistes. Par ailleurs, un péquiste sur trois (33 %) considère que le temps de la souveraineté du Québec est révolu.
Comment expliquer la résurgence du PQ, si ce n’est par un regain d’intérêt pour la souveraineté? La réponse est probablement une simple combinaison des faux pas des gouvernements québécois et canadien, et de l’incapacité des autres partis d’opposition à en tirer profit.
La proportion de Québécois insatisfaits de la direction du Canada a grimpé de 14 points de pourcentage entre 2023 et 2024 (de 32 à 46 %). L’insatisfaction à l’égard de la gestion du système de santé par la province (qui était déjà élevée) a également augmenté au cours de la dernière année. La proportion de personnes considérant que le gouvernement du Québec les représente le mieux a diminué, tandis que la proportion déclarant qu’aucun gouvernement ne les représente adéquatement a plus que doublé, passant de 11 à 24 %.
Pendant ce temps, le Parti libéral du Québec reste à la dérive et sans chef, et Québec Solidaire n’a toujours pas réussi à s’implanter en dehors des grandes zones urbaines. La politique, comme la nature, a horreur du vide, et le PQ, avec un leader plus charismatique, a su remplir cet espace.
Cela dit, avant que les fédéralistes concluent qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter – et que la montée du PQ dans les sondages est davantage motivée par des cauchemars sur les temps d’attente dans les hôpitaux que par des rêves d’indépendance – il convient de rappeler le revers de la médaille.
Alors que la proportion de Québécois francophones s’identifiant principalement comme souverainistes ne tend pas à augmenter, la proportion de ceux qui s’identifient principalement comme fédéralistes reste faible – moins d’un sur cinq. Seulement 42 % des Québécois estiment que le fédéralisme canadien présente plus d’avantages que d’inconvénients pour leur province. Et pour la sixième année consécutive, notre enquête révèle qu’environ 7 Québécois francophones sur 10 estiment que la langue française au Québec est menacée.
L’absence d’une résurgence du soutien à la souveraineté ne doit donc pas être interprétée comme une indication d’un soutien plus fort au fédéralisme.
Ceci est le premier d’une série de deux articles. Dans le second texte, les auteurs examinent plus en détail certains facteurs liés à l’appui à la souveraineté au Québec.
Détails méthodologiques
Les sondages de la Confédération de demain sont des études annuelles menées par un regroupement d’importants organismes de recherche socio-économique et de politique publique du pays : l’Environics Institute for Survey Research, le Centre d’excellence sur la fédération canadienne, la Canada West Foundation, le Centre d’analyse politique – Constitution et fédéralisme, le Brian Mulroney Institute of Government et le First Nations Financial Management Board. Les enquêtes permettent aux Canadiens de s’exprimer sur les grandes questions qui façonnent l’avenir de la fédération et de leurs communautés politiques.
L’étude 2024 consiste en un sondage réalisé auprès de 6036 adultes entre le 13 janvier et le 4 mars 2024 (80 % des réponses ont été recueillies entre le 18 et le 26 janvier); 95 % des réponses ont été recueillies en ligne. Les autres réponses ont été recueillies par téléphone auprès de répondants vivant dans le Nord ou au sein des communautés autochtones.
Les résultats présentés ci-dessus concernent 1621 Québécois, dont 1297 francophones.
Les réponses à l’enquête sont pondérées en fonction de l’âge, du sexe, de la région, du niveau d’éducation, de l’identité autochtone et de la langue parlée à la maison, afin d’être représentatives de la répartition réelle de la population adulte canadienne.
Le plus récent budget du gouvernement Trudeau renferme un certain nombre de mesures qui ont fait jaser, allant d’une politique du logement à la défense nationale. Dans un contexte de crise pancanadienne du logement et de menaces géopolitiques croissantes, il n’est pas surprenant que ces domaines politiques retiennent l’attention.
Dans le budget, le gouvernement s’est aussi penché sur le retard de productivité du Canada. Cet enjeu est peut-être moins bien compris, mais il est déterminant dans la capacité du pays à financer des solutions à nos défis nationaux les plus pressants. Le dépoussiérage de notre politique industrielle peut faire partie de la solution.
Les retards de productivité du Canada ne sont pas nouveaux. Les commentateurs économiques en parlent depuis des années. Dans un récent discours, Carolyn Rogers, première sous-gouverneure de la Banque du Canada, a toutefois souligné l’urgence d’agir.
« Il y a péril en la demeure. Il faut agir », a-t-elle déclaré.
En d’autres mots, la productivité n’est plus qu’un simple problème. C’est une urgence nationale.
À côté de l’augmentation du coût de la vie – en particulier du coût du logement – la productivité peut sembler un concept abstrait. Pourquoi dépenser de l’argent pour rendre les entreprises plus efficaces alors que de nombreux ménages ont du mal à payer leurs factures ? C’est une question importante à laquelle les élus doivent répondre.
La productivité n’est pas une simple technicalité statistique. Ce n’est pas non plus quelque chose qui ne fait que gonfler les résultats financiers des entreprises. Elle détermine la quantité de produits que les Canadiens peuvent produire et, par conséquent, la quantité de biens dont nous pouvons profiter.
Les investissements dans la productivité, qu’il s’agisse d’immobilisations importantes, comme des machines de pointe pour améliorer la production manufacturière, ou d’ajustements marginaux, comme de meilleurs logiciels pour améliorer la production agricole, signifient que nous sommes en mesure de produire plus de biens et de services par heure travaillée. En d’autres termes, cela signifie que nous obtenons plus de résultats pour la même quantité d’efforts. L’augmentation de la productivité se traduit par une amélioration du niveau de vie et une plus grande capacité à financer d’importants programmes sociaux.
Prenons l’exemple du logement. Plusieurs analystes ont estimé qu’il manquait plus de trois millions de logements au Canada. C’est un chiffre impressionnant. Pour atteindre cet objectif, nous devons en augmenter la production. À moins que nous investissions massivement pour attirer les jeunes vers les métiers du bâtiment ou que nous ne réorientions complètement notre politique d’immigration pour nous concentrer sur les travailleurs de la construction, nous devons bâtir plus de logements par travailleur. Dit autrement, nous avons besoin d’une plus grande productivité.
Augmenter la productivité n’est pas une mince tâche. Si c’était le cas, ce serait déjà fait. Il est assez facile de dire aux entreprises qu’elles doivent investir davantage dans des équipements ou des logiciels. Mais elles doivent d’abord disposer des bonnes incitations et des bons outils.
La politique industrielle est l’un des outils potentiels permettant d’appuyer sur l’accélérateur.
L’idée que l’État a un rôle à jouer pour orienter les entreprises privées dans une direction donnée est souvent considérée comme contraire à une économie de marché. En réalité, nous avons toujours pratiqué une certaine forme de politique industrielle. Cela va des interventions passées à grande échelle pour développer les sables bitumineux de l’Alberta aux crédits d’impôt pour la recherche et le développement.
Le budget contient de nombreux éléments relevant de la politique industrielle et visant à soutenir les technologies propres, l’intelligence artificielle, la réconciliation avec les peuples autochtones, en plus d’autres priorités essentielles.
Une personne cynique pourrait affirmer que le gouvernement fédéral se contente de jeter de l’argent à des parties prenantes. En effet, un certain scepticisme est justifié. Après tout, s’il y a de l’argent à gagner quelque part, pourquoi le secteur privé n’y intervient-il pas ?
Le problème, c’est que les incitations sont variables. Prenons un autre exemple : les chaînes d’approvisionnement. Normalement, les chaînes d’approvisionnement mondiales fonctionnent rondement. Notre économie hautement mondialisée nous offre un éventail de biens et de services dont les générations précédentes n’auraient pu que rêver.
Cependant, la pandémie de COVID-19 et l’invasion de l’Ukraine par la Russie ont montré que nous ne pouvons pas considérer cette stabilité comme acquise. Le contexte géopolitique, les catastrophes naturelles et les maladies infectieuses, entre autres, peuvent perturber les chaînes d’approvisionnement. Ça n’est pas un réel problème lorsqu’on achète des babioles sur Amazon. Mais c’est un désastre s’il s’agit d’obtenir des vaccins qui pourraient sauver une vie. Nous ne devons pas mettre tous nos œufs dans le même panier. Personne ne veut revivre une pénurie de papier hygiénique.
C’est là que la politique industrielle peut être utile. Parfois, il existe des intérêts publics plus larges pour lesquels les entreprises individuelles n’ont pas les bonnes incitations. Les exemples ne manquent pas. La délocalisation ou le raccourcissement des chaînes d’approvisionnement peut être coûteux et désavantager les entreprises sur le plan de la concurrence ; les entreprises peuvent être confrontées à des obstacles liés aux coûts pour adopter des technologies plus propres ; elles peuvent ne pas voir la valeur monétaire de la réconciliation avec les peuples autochtones, et elles peuvent ne pas avoir la capacité d’engager des coûts initiaux élevés pour la recherche et le développement sur les technologies de l’avenir. C’est là que les gouvernements pourraient avoir un rôle à jouer.
Le Canada ne serait pas le premier grand pays à doubler la mise sur la politique industrielle. Des pays comme la Chine et l’Allemagne poursuivent des stratégies agressives en matière de politique industrielle. Même les États-Unis ont adopté une politique industrielle, dont la meilleure illustration est peut-être leur Inflation Reduction Act et la CHIPS and Science Act. Ces mesures ont entraîné une explosion des projets de construction.
Il ne s’agira pas simplement de construire des gadgets pour créer des emplois. Ça signifie qu’une partie des semi-conducteurs les plus avancés au monde sera désormais fabriquée sur le sol américain, ce qui réduira la dépendance du monde à l’égard de ceux produits à Taïwan. Compte tenu des menaces géopolitiques en Asie et des inquiétudes persistantes quant à la prévisibilité de la chaîne d’approvisionnement, la construction de ces intrants vitaux en Amérique du Nord est une bonne chose. Ce n’est pas pour rien que même des conservateurs comme le sénateur américain Marco Rubio veulent redoubler d’efforts en matière de politique industrielle.
Cela ne veut pas dire que la politique industrielle fait l’unanimité, et encore moins qu’elle est parfaite. Il n’est pas difficile de trouver des exemples d’initiatives de politique industrielle qui ont échoué. Les gouvernements qui s’engagent dans une politique industrielle ont besoin d’une stratégie solide, de données fiables et d’une évaluation rigoureuse. Ils doivent également savoir quand réduire leurs pertes. Tout cela est plus facile à dire qu’à faire.
Le Québec a besoin de solutions à ses défis financiers à long terme
Ottawa sauve la mise en haussant l’impôt sur le gain en capital
Si la politique industrielle peut s’avérer nécessaire pour maintenir ou développer une présence dans certaines industries lourdes généreusement financées par d’autres pays, les coûts peuvent être énormes. L’ampleur des récentes initiatives de politique industrielle, telles que les usines de batteries pour véhicules électriques ou les crédits d’impôt pour les investissements dans les énergies propres, qui se chiffrent à plusieurs milliards de dollars, devrait nous inciter à optimiser nos ressources. Nous ne pouvons pas nous contenter de signer des chèques en blanc. Le plus souvent, nous devons faire en sorte que ces investissements soient judicieux.
Les efforts visant à stimuler la productivité à moyen et long terme se font au détriment des priorités à court terme. Essentiellement, si nous dépensons un dollar pour la construction d’une usine plutôt que pour les soins de santé, nous devons nous assurer que la rentabilité de l’investissement est réaliste et attrayante. Après tout, l’un des principaux objectifs de l’augmentation de la productivité est d’améliorer notre capacité à générer les recettes fiscales nécessaires pour payer des services tels que les soins de santé.
Si la politique industrielle peut être une voie prometteuse pour stimuler la productivité, nous ne devons pas nous y engager à la légère. Nous avons besoin de politiques crédibles, fondées sur des données probantes et liées à une stratégie cohérente, plutôt que de décisions ad hoc. Nous avons également besoin d’une gouvernance solide, d’une conception des politiques qui attire les capitaux privés au lieu de les remplacer, et d’une mise en œuvre efficace et rapide. Il est bon que le gouvernement réfléchisse à la productivité, mais il ne s’agit pas d’appuyer sur un bouton. Il faut réfléchir aux moindres détails.
C’est la recherche de ces détails qui motive le programme de recherche Refonder la croissance économique sur de nouvelles bases de l’IRPP. Nous continuerons à produire et à partager des recherches visant à renforcer la productivité du Canada bien après que l’encre du budget soit sèche.
Cet article a été initialement publié dans le Hill Times le 13 mars 2024
Avec l’inflation qui commence à baisser, beaucoup semblent croire que la crise de l’abordabilité touche à sa fin. Ce n’est pas le cas pour les personnes à faibles revenus, qui resteront coincées entre les coûts élevés des nécessités de base et les salaires et avantages sociaux qui n’ont pas suivi l’inflation.
Même si la Banque du Canada parvient à ramener l’inflation globale à une hausse de 2 % d’une année à l’autre, les prix resteront bien plus élevés qu’ils ne l’étaient il y a trois ans.
Les coûts des besoins de base tels que le logement, la nourriture et l’énergie sont peut-être aussi les plus difficiles à contrôler, étant donné la dynamique complexe qui existe tant du côté de l’offre que de la demande. En concentrant les efforts uniquement sur les prix, on ne tient pas compte du fait que certains ménages ne disposent tout simplement pas d’un revenu suffisant pour couvrir les coûts des produits de première nécessité.
En ce qui concerne le logement, la Banque du Canada a reconnu que les taux d’intérêt ne suffiraient pas à faire baisser les prix. Le problème fondamental est qu’il y a trop de gens et pas assez de logements. Tous les niveaux de gouvernement doivent intervenir pour que des logements soient construits le plus rapidement possible en s’attaquant aux obstacles auxquels se heurtent les promoteurs privés et à but non lucratif. Ils doivent également se pencher sérieusement sur la demande.
Les prix des denrées alimentaires méritent aussi une analyse plus ciblée. La guerre en Ukraine a provoqué une flambée des prix des céréales qui s’est répercutée dans le monde entier en 2022. Les changements climatiques font également des ravages sur les prix des denrées alimentaires. La sécheresse qui a sévi en Californie en 2022 a contribué à ce que les Canadiens paient leurs légumes frais 11 % plus cher que l’année précédente. La sécheresse au Brésil a entraîné une hausse des prix du café et du sucre, et celle attendue dans les Prairies canadiennes cet été pourrait contribuer à maintenir les prix des denrées alimentaires à un niveau élevé. Les hausses de taux d’intérêt et les reproches adressés aux détaillants en alimentation n’aident pas les familles qui luttent actuellement pour mettre de la nourriture sur la table.
Alors que de plus en plus de Canadiens ont du mal à faire leurs courses après avoir payé leur loyer et leurs factures de services publics, les gouvernements ne peuvent plus se contenter d’une approche attentiste. Les prix de la nourriture et du logement sont au moins 20 % plus élevés qu’en 2021. Près de 7 millions de personnes au Canada, dont 2 millions d’enfants et 40 % des mères célibataires, vivent dans l’insécurité alimentaire et le recours aux banques alimentaires a augmenté de 80 % depuis 2019. Les effets à long terme de l’insécurité alimentaire sur les familles et les enfants devraient suffire à tirer la sonnette d’alarme.
Les gouvernements doivent intervenir pour s’assurer que les revenus sont suffisants pour mettre de la nourriture sur la table. Récemment, le Conseil d’action sur l’abordabilité a recommandé de restructurer et d’élargir le crédit pour la TPS/TVH destiné aux ménages à faible revenu et de le renommer « Allocation pour l’épicerie et les besoins de base ».
Les prix de l’essence et les coûts du chauffage domestique sont également au cœur des préoccupations de nombreux Canadiens. Les prix de l’énergie ont été l’un des principaux moteurs de l’inflation, même s’ils se sont modérés au cours de la dernière année. Les perspectives à long terme pour les prix du pétrole et du gaz naturel risquent toutefois d’être marquées par la volatilité. Cette réalité sera très difficile pour les ménages à faible revenu, qui ont tendance à vivre dans des maisons plus inefficaces du point de vue énergétique et qui ne sont pas en mesure d’assumer les coûts initiaux associés à en améliorer l’efficacité ou à passer à des solutions de remplacement telles que les thermopompes et les voitures électriques.
Au Canada, les gouvernements ont largement manqué de vision globale et à long terme sur l’abordabilité de l’énergie. Les solutions temporaires proposées, telles que la suspension de la taxe carbone sur le chauffage au mazout, risquent d’aggraver la situation des ménages à faible revenu en raison de la perte des remboursements. Elles n’aideront pas non plus les ménages à long terme, étant donné que les forces du marché mondial sont les principaux moteurs des prix du pétrole et du gaz naturel.
Les véritables solutions durables aux prix de l’énergie sont celles qui aident les ménages à réduire leur consommation d’énergie, à améliorer l’efficacité de leur logement et à réduire leur dépendance à l’égard des combustibles fossiles aux prix volatils. Le soutien des gouvernements à la rénovation écoénergétique pour les ménages à faibles revenus, aux thermopompes et aux transports en commun est bien plus efficace que des modifications fiscales temporaires. Les gouvernements devraient également faire davantage pour s’assurer que les maisons construites aujourd’hui sont adaptées à l’avenir, qu’elles dépendent moins des combustibles fossiles et de la voiture, et qu’elles sont plus résistantes aux risques croissants liés aux changements climatiques, tels que la fumée des incendies de forêt, les inondations et les vagues de chaleur. Sinon, les logements construits présentement placeront les Canadiens devant des décennies de crises récurrentes en matière d’abordabilité.
Dans la lutte actuelle contre l’inflation, les banques centrales et les gouvernements devraient travailler en tandem pour mieux comprendre les facteurs sous-jacents à l’augmentation des prix, pour analyser les sources potentielles de volatilité des prix à l’avenir et pour définir des mesures claires à prendre, tout en tenant compte des réalités des familles à travers l’éventail des tranches de revenus.
L’un des rôles les plus importants des gouvernements est de veiller à ce que leurs citoyens aient un toit au-dessus de leur tête et de la nourriture sur leur table. Il est temps qu’ils interviennent de manière plus audacieuse, plutôt que de s’en remettre uniquement à la Banque du Canada.
Yasmin Abraham est présidente et cofondatrice du Kambo Energy Group et membre du Conseil d’action sur l’abordabilité.
Lisa Rae est directrice du changement de système à Prosper Canada et membre du Conseil d’action sur l’abordabilité.
Rachel Samson est vice-présidente à la recherche à l’Institut de recherche en politiques publiques, une des organisations fondatrices du Conseil d’action sur l’abordabilité.
La COVID-19 circule toujours bel et bien cet hiver et elle participe au cocktail de maladies respiratoires qui remplissent les salles d’urgence partout au pays. En dépit de ceci, les gouvernements ont tourné leur attention vers la gestion des conséquences postpandémiques.
Maintenant que le traumatisme et les bouleversements liés aux restrictions sanitaires de la pandémie sont derrière nous, les décideurs consacrent désormais l’essentiel de leur attention à la crise de l’abordabilité et à des réseaux de la santé qui craquent de partout.
Mais où sont leurs bilans sur les enseignements tirés de la pandémie ?
Des universitaires et des représentants de la société civile ont publié des études et des rapports sur la gestion gouvernementale de la pandémie, dont une série d’articles publiés par le BMJ (anciennement connu comme le British Medical Journal) sur l’obligation de rendre compte de la réponse du Canada à la COVID-19.
Le Centre d’excellence sur la fédération canadienne de l’IRPP a publié son propre rapport, en partenariat avec l’Institut sur la gouvernance, intitulé Institutions résilientes : Apprendre de la pandémie de COVID-19 au Canada.
Des rapports comme le nôtre peuvent mettre la table à la réflexion, mais ils ne remplacent pas ceux réalisés par les gouvernements eux-mêmes et qui manquent encore grandement à l’appel. Nous ne disposons ni des ressources ni des accès nécessaires pour réaliser le type d’étude que notre pays mérite sur les leçons à tirer de la crise sanitaire.
Nos gouvernements doivent comprendre comment ils peuvent se coordonner pour mieux répondre aux crises futures.
Pourquoi cette absence de rapports ? Peut-être parce que les gouvernements n’ont tout simplement pas encore pris le temps de les produire.
Le gouvernement fédéral a récemment chargé un groupe d’experts de rédiger un rapport qui devrait paraître en mars sur l’approche fédérale en matière de conseils scientifiques et de coordination de la recherche en cas de pandémie
En novembre, l’Alberta a publié un rapport sur l’examen de la législation ayant une incidence sur sa réponse à la COVID-19. Toutefois, de nombreux autres gouvernements n’ont pas encore annoncé leur intention de procéder à un quelconque réexamen.
Dans le cadre de nos travaux sur la résilience de nos institutions, nous avons analysé les rapports sur la COVID-19 publiés ou commandés par les gouvernements et accessibles au public.
Nous nous sommes particulièrement intéressés aux rapports publiés par les ministères, compte tenu de leur perspective interne sur ce qui s’est passé pendant la pandémie. Nous avons contacté les greffiers provinciaux et territoriaux pour vérifier si de tels rapports avaient été publiés. Nous avons été surpris de constater que six provinces n’ont publié aucun bilan.
Même s’il s’agit d’une des crises de politique publique les plus dévastatrices de ce siècle, la moitié des gouvernements du pays n’ont publié aucune réflexion interne (voir figure 1). La barre est très basse, et pourtant, près de la moitié des provinces et des territoires du pays ne l’ont pas franchie.
Sur les 61 rapports que nous avons identifiés, 38 des rapports publics portant sur la COVID-19 ont été rédigés par des vérificateurs généraux. Ceux-ci jouent un rôle important en matière de responsabilité gouvernementale, mais ils sont limités dans leur mandat, qui consiste à réaliser des audits de performance et financiers. Ils ne peuvent pas, par exemple, se demander si une décision devait être prise. Ils peuvent évaluer si un programme a atteint les objectifs de performance ou respecté le budget, mais pas si un gouvernement devait ou non mettre un programme en œuvre en premier lieu.
Cinq autres rapports ont été rédigés par des groupes d’experts externes mandatés par les gouvernements. Les groupes d’experts peuvent être utiles en fournissant une évaluation indépendante des performances gouvernementales. Bien entendu, les mérites de ce type de rapports dépendent du mandat, de la composition de ces groupes d’experts et de l’expérience qu’ils ont des complexités du service public.
Les rapports internes des gouvernements présentent aussi des avantages. Les gouvernements sont les mieux placés pour comprendre les processus et les structures qui ont permis de gérer l’un des casse-tête politiques les plus difficiles de ce siècle. Personne ne comprend mieux la réponse gouvernementale à la pandémie que les gouvernements eux-mêmes.
Malheureusement, aucun des 61 rapports recensés n’est une étude comparative pancanadienne des leçons tirées de la pandémie. Aucune n’a été tentée ni même annoncée. Une étude pancanadienne est une tâche intrinsèquement difficile en raison de la contribution nécessaire de chaque ordre de gouvernement. Voilà pourquoi une telle initiative devrait être initiée par le gouvernement fédéral.
Une meilleure coordination entre les différentes instances est nécessaire pour éviter de causer des dommages, en particulier aux communautés mal desservies.
En juin dernier, nous avons organisé la conférence « Institutions résilientes » où de hauts fonctionnaires, des universitaires et des représentants de la société civile se sont réunis pour discuter des enseignements tirés de la pandémie. Au cours de cette conférence, un grand nombre des 35 panélistes ont parlé de la confusion entourant les différentes compétences et du fait que certaines responsabilités traitées comme des « patates chaudes » ont conduit à de mauvais résultats.
L’un des exemples les plus flagrants est la fermeture des frontières provinciales, qui a empêché les élèves de la Première Nation Mi’gmaq de Listuguj de se rendre à l’école étant donné que la communauté se trouve au Québec, mais l’école secondaire au Nouveau-Brunswick.
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Un autre exemple est celui des municipalités qui se sont retrouvées avec peu de ressources ou de coordination. Kennedy Stewart, ancien maire de Vancouver, a déploré le fait qu’il n’ait pu obtenir qu’une seule brève conversation au téléphone avec John Horgan, alors premier ministre de la Colombie-Britannique, pendant toute la durée de la pandémie.
Sans examen permettant de comprendre les structures, les processus et les relations nécessaires pour mieux se préparer à des catastrophes transnationales, le Canada se trouve dans une position vulnérable. Les virus et les catastrophes naturelles ne connaissent pas de frontières : les gouvernements vont donc devoir trouver un moyen de travailler ensemble.
En outre, les gouvernements doivent examiner la solidité de la fédération canadienne, ainsi que la souplesse et la rapidité de ses réponses. Nos institutions ont en grande partie bien fonctionné pour mettre en œuvre la stratégie gouvernementale face à la COVID-19, mais le fédéralisme exécutif, dans lequel les premiers ministres fédéral et provinciaux dirigent une grande partie de la réponse institutionnelle, a été le fondement de l’approche gouvernementale.
Les différents gouvernements doivent trouver un moyen de travailler ensemble sans dépendre des réunions hebdomadaires des premiers ministres, une stratégie qui n’est pas viable à moyen ou à long terme. Dans un premier temps, il importe d’identifier les processus et les structures qui ont le mieux fonctionné.
Pour ce faire, on pourrait procéder à un examen opérationnel approfondi des comités et des groupes de travail qui ont participé à la réponse fédérale, provinciale et territoriale à la pandémie. Cela pourrait se faire dans le cadre d’une étude pancanadienne sur les enseignements tirés de la pandémie.
Première grande crise de la décennie, la pandémie a mis à l’épreuve la collaboration entre les différentes instances politiques. Les gouvernements doivent se familiariser avec des moyens de communication qui fonctionnent. Ils doivent tirer parti de l’échange d’informations qui a eu lieu et créer des opportunités pour que ces relations se poursuivent après la pandémie.
Lors de notre conférence, un intervenant a fait remarquer qu’après la fin de la pandémie, ses collègues d’autres provinces ont cessé de lui tendre la main, de même que ceux de son bureau. Ce n’est là qu’un exemple du « retour en arrière » que les gouvernements devraient éviter. La fédération se porte mieux lorsque les gouvernements se parlent.
On a demandé aux Canadiens d’accepter des restrictions de grande envergure, comme la fermeture des frontières et les couvre-feux, souvent sans explication et avec un préavis très court. Ils doivent avoir l’assurance que les gouvernements reconnaissent ces coûts et qu’ils s’efforcent de faire en sorte que ces mesures soient proportionnées et limitées à l’avenir. Le comportement des gouvernements après la pandémie donnera le ton pour les crises futures.
Les gouvernements doivent apprendre à tirer les leçons de leurs erreurs. La pandémie est une occasion unique de le faire. Le rapport Institutions résilientes est un début, mais il appartient aux gouvernements de s’appuyer sur le travail qu’il contient pour entamer la démarche grandement nécessaire qui ne saurait émaner que d’eux.
Il fut un temps où le Canada s’enorgueillissait de ses systèmes d’immigration et d’enseignement supérieur très respectés. On ne s’en rendrait pas compte en lisant les gros titres d’aujourd’hui.
Comment en est-on arrivé là ?
Il y a une dizaine d’années, le gouvernement fédéral a apporté plusieurs modifications aux règles d’immigration du Canada, facilitant ainsi l’obtention de la résidence permanente pour les étudiants étrangers, principalement en leur permettant de rester et de travailler après l’obtention de leur diplôme. Au bout de trois ans, les résidents permanents pouvaient ensuite demander la citoyenneté canadienne.
Ces changements avaient plusieurs objectifs. Le Canada souhaitait attirer une plus grande proportion d’étudiants étrangers et mieux rivaliser avec d’autres pays d’accueil prisés par ceux-ci, notamment les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie.
Mais ces changements ont également été perçus comme un moyen de résoudre l’un des principaux problèmes du système canadien d’immigration fondé sur des points : le Canada admet de nombreux travailleurs hautement qualifiés ayant souvent des difficultés à trouver un emploi dans leur domaine parce que leurs diplômes étrangers et leur expérience professionnelle ne sont pas reconnus par les employeurs.
Les étudiants étrangers étaient considérés comme une poule aux œufs d’or. Formés au Canada, ils possédaient les compétences linguistiques, les diplômes canadiens ainsi que l’expérience professionnelle nationale recherchée par les employeurs.
Pour les universités et les établissements d’enseignement supérieur, les étudiants étrangers ont élargi leur vivier d’étudiants de haut niveau et ont apporté des revenus supplémentaires à un moment où les inscriptions nationales diminuaient en raison des changements démographiques. Les étudiants étrangers paient des frais de scolarité beaucoup plus élevés que les étudiants nationaux.
Le nombre d’étudiants étrangers au Canada, tous niveaux confondus, a atteint plus d’un million à la fin de 2023, soit une hausse de 29 % par rapport à 2022 et de plus de 200 % par rapport à la décennie précédente. Plus de la moitié d’entre eux se trouvaient en Ontario, la Colombie-Britannique étant la deuxième destination la plus populaire avec 20 % des inscriptions.
De nombreux établissements ont bénéficié des nouvelles règles, mais certains plus que d’autres. En Ontario, les établissements publics, en particulier ceux des régions du Nord et des petites villes, qui connaissaient une baisse plus prononcée des inscriptions nationales, ont eu du mal à attirer des étudiants étrangers.
Pour surmonter cet obstacle, ils ont commencé à conclure des accords avec des établissements privés situés dans la région du Grand Toronto, région préférée par la plupart des étudiants internationaux.
Dans le cadre de ces ententes, l’étudiant est admis dans un établissement public, mais la formation est dispensée par des établissements privés, principalement situés dans la région du Grand Toronto, souvent dans des centres commerciaux et des immeubles de bureaux.
L’institution publique conserve une partie des frais payés par les étudiants étrangers et les diplômés obtiennent un diplôme qui leur permet d’obtenir un permis de travail postuniversitaire et, éventuellement, un permis de résidence permanente. En 2021, 11 établissements publics de l’Ontario avaient conclu des partenariats avec des établissements privés.
En 2017, David Trick, ancien sous-ministre adjoint de l’enseignement postsecondaire en Ontario, a examiné ces partenariats et a conclu qu’ils présentaient des risques pour la qualité de l’enseignement et la réputation de l’ensemble du réseau postsecondaire. Il a recommandé d’y mettre un terme.
Le gouvernement libéral de l’époque avait alors imposé un moratoire sur les nouveaux partenariats. Il a été levé après l’élection d’un gouvernement progressiste-conservateur dans la province, en 2018.
En 2019, celui-ci a également réduit de 10 % les frais de scolarité postsecondaires et a imposé un gel sur les hausses futures des frais de scolarité qui est toujours en vigueur aujourd’hui. La perte de revenus provenant des frais de scolarité n’a pas été remplacée par une augmentation des subventions de fonctionnement.
Un rapport publié en 2021 par le vérificateur général de l’Ontario indique qu’au cours des quatre années précédant la pandémie, les recettes provenant des frais de scolarité des étudiants étrangers ont augmenté pour atteindre 1,75 milliard $ en 2019-20, contre 696 millions $ en 2016-2017. Cette somme représentait 68 % de l’ensemble des recettes provenant des frais de scolarité.
Le rapport a également tiré la sonnette d’alarme sur la popularité croissante des partenariats public-privé, constatant que la surveillance provinciale de ces accords faisait défaut et qu’il n’existait pas de stratégie pour atténuer le risque que représentait une dépendance aussi forte à l’égard des inscriptions d’étudiants étrangers pour les établissements d’enseignement postsecondaire de la province.
L’augmentation du nombre d’étudiants étrangers ne s’est pas limitée aux collèges de l’Ontario. Les universités ont également pris le train en marche. Les étudiants étrangers de l’Université du Cap-Breton, en Nouvelle-Écosse, représentent les deux tiers du nombre total d’inscriptions et sont le moteur de l’augmentation globale des inscriptions ces dernières années.
Un rapport distinct du vérificateur général de l’Ontario sur la gestion financière de quatre universités ontariennes – Algoma, Nipissing, Ontario Tech et Windsor – a noté que la grande majorité des étudiants de ces établissements étaient originaires de l’Inde, dont 85 % d’étudiants étrangers à Algoma et 60 % à Windsor.
Les établissements d’enseignement supérieur font valoir à juste titre que ces étudiants apportent de nombreux avantages aux campus canadiens au-delà des considérations financières, notamment la diversité et les perspectives culturelles qui constituent des enseignements précieux pour les étudiants canadiens. Ils contribuent également à la main-d’œuvre hautement qualifiée du Canada et aident à compenser la pénurie de main-d’œuvre.
Mais cet afflux rapide a également suscité de nombreuses inquiétudes. Les nouveaux étudiants se sont plaints des longs délais de traitement des demandes de visa et des retards dans l’obtention de leur permis de travail postuniversitaire, ainsi que de la pénurie de logements étudiants abordables, des pratiques contraires à l’éthique de certains recruteurs d’étudiants et des problèmes financiers et de santé mentale. Certains ont été contraints de se tourner vers les banques alimentaires.
D’autres ont reproché à l’afflux d’étudiants d’aggraver la pénurie de logements au Canada et d’accroître la pression sur nos services de santé.
En réponse, le ministre de l’Immigration Marc Miller a annoncé plus tôt cette année que le gouvernement fédéral fixerait un plafond pour les permis d’études internationaux pendant deux ans. En 2024, le plafond sera fixé à environ 360 000 permis, soit une baisse de 35 % par rapport à 2023.
Les autorisations seront attribuées par province et par territoire, en fonction de la population. Les provinces répartiront ensuite les permis entre les établissements. Le plafond ne s’applique pas aux programmes de maîtrise et de doctorat ni aux études primaires et secondaires.
En outre, à partir du 1er septembre, les étudiants internationaux qui commencent un programme dans le cadre d’un partenariat public-privé ne pourront plus bénéficier d’un permis de travail postuniversitaire. Cette mesure s’ajoute aux annonces précédentes qui ont relevé les exigences en matière de coût de la vie pour les demandeurs de permis d’études et d’autres réglementations.
Le système d’enseignement postsecondaire canadien a toujours eu de nombreuses raisons de se réjouir. Nous arrivons régulièrement en tête des classements de l’OCDE en matière de niveau d’éducation.
Nos établissements vont des universités de recherche de renommée mondiale aux petites institutions d’arts libéraux, en passant par le vaste réseau de collèges et cégeps censés répondre aux besoins de la communauté. On peut supposer que c’est ce qui a attiré les étudiants étrangers en premier lieu.
Tout cela semble aujourd’hui menacé. Contraints de faire face à une réduction des permis d’études internationaux, de nombreux établissements vont se retrouver en difficulté.
En Ontario, l’Université Laurentienne s’est placée sous la protection de la loi sur les créanciers en 2021 et l’Université Queen’s a publiquement fait état de ses difficultés financières, les attribuant à la réduction des frais de scolarité, à l’inflation élevée et à la baisse des inscriptions d’étudiants étrangers pendant la pandémie. Les gouvernements interviendront-ils ou verrons-nous d’autres établissements suivre le chemin de l’Université Laurentienne ?
Les étudiants étrangers devraient jouer un rôle à part entière dans notre système d’immigration, mais ils ne devraient pas être utilisés comme un moyen de maintenir la rentabilité des établissements d’enseignement supérieur. Les gouvernements doivent rétablir un financement adéquat des universités et des collèges.
Un rapport récent d’un groupe d’experts de l’Ontario a recommandé de mettre fin au gel des frais de scolarité dans la province et d’augmenter le financement par étudiant, en notant que « de nombreux collèges et universités ont dépassé le stade où ils pourraient survivre financièrement avec les seuls étudiants nationaux ».
Le gouvernement de l’Ontario a récemment annoncé une augmentation d’un milliard $ sur trois ans, ce qui est loin de l’augmentation de 2,5 milliards $ recommandée par le groupe d’experts.
Les institutions doivent également faire leur part. Ils n’ont pas voulu admettre que la diminution du nombre d’étudiants nationaux les obligeait à réduire leurs activités.
Il est temps de renouer avec la fierté que nous avions autrefois à l’égard de nos établissements d’enseignement supérieur et de notre système d’immigration.
Depuis que la Chambre des communes a repris ses travaux pour la session d’automne, la question de l’accessibilité financière est à l’avant-plan.
Le gouvernement fédéral a introduit la Loi sur le logement et l’épicerie à prix abordable afin de stimuler la construction de nouveaux immeubles d’habitation et accroître la concurrence entre les épiciers. Il a également haussé les sommes disponibles pour du financement à faible coût pour les promoteurs et constructeurs de logements locatifs.
Les Canadiens souffrent, particulièrement ceux dont les revenus sont plus faibles. Les politiciens ont enfin compris le message. Bien que le taux d’inflation ait diminué au cours des derniers mois, les prix restent élevés et l’augmentation des prix des aliments et du logement continue de dépasser l’inflation globale.
La lutte contre l’inflation ne suffira cependant pas à rendre la vie abordable pour de nombreux Canadiens. Près de sept millions de personnes – dont 1,8 million d’enfants – ont vécu de l’insécurité alimentaire en 2022. C’est un million de plus qu’en 2019.
Les conséquences sur la santé vont bien au-delà de l’alimentation. Des études montrent que les ménages en situation d’insécurité alimentaire dépensent moins pour d’autres besoins essentiels tels que le logement, le transport et les médicaments.
Que faut-il faire ?
En premier lieu, le gouvernement fédéral doit faire avancer la réforme de l’assurance-emploi qu’il a promise depuis longtemps. Ottawa s’est engagé à moderniser ce programme afin de refléter les changements survenus sur le marché du travail et pour couvrir une plus grande proportion de travailleurs. Les Canadiens attendent encore.
Selon les règles d’admissibilité actuelles, un demandeur doit avoir travaillé entre 420 et 700 heures au cours des 12 mois précédents, selon son lieu de résidence, pour percevoir des prestations. Par exemple, un employé d’épicerie de Corner Brook, à Terre-Neuve, doit avoir cumulé 490 heures de travail pour être admissible, tandis que son homologue de Toronto doit avoir travaillé 665 heures.
Les personnes admissibles reçoivent un paiement équivalant à 55 % de leur salaire. Ce même employé d’épicerie de Toronto, qui travaille à temps plein et gagne le salaire minimum, recevrait donc 1456 $ par mois de l’assurance-emploi, dans une ville où le loyer moyen d’un appartement libre d’une chambre est de 2541 $.
Une meilleure politique serait d’établir un seuil d’admissibilité uniforme de 420 heures partout au pays, comme c’était le cas pendant la pandémie de COVID-19, et de relever le taux de remplacement des revenus à 60 %.
Bien qu’il soit resté discret sur le plan de l’assurance-emploi, Ottawa a pris des mesures pour élargir le filet social au pays, notamment en introduisant le nouveau régime canadien de soins dentaires, un programme de services de garde à 10 $ par jour, un projet de prestation pour les personnes handicapées et un remboursement unique sur les produits d’épicerie. Il s’agit d’un bon point de départ, mais ce n’est pas assez.
En outre, en vertu de l’entente de soutien et de confiance conclue avec le NPD, le Parti libéral s’est engagé à déposer cet automne un projet de loi visant à mettre en place un régime national d’assurance médicaments.
Le régime de soins dentaires constitue la plus importante extension du régime public d’assurance maladie depuis 50 ans. Il est mis en œuvre graduellement, en commençant par les enfants de moins de 12 ans. Le gouvernement estime qu’une fois le régime entièrement mis en place à la fin de 2025, il couvrira jusqu’à neuf millions de Canadiens non assurés à revenu faible ou modeste – une avancée importante pour un pays qui est largement considéré comme à la traîne par rapport à ses homologues de l’OCDE en ce qui concerne la fourniture de soins dentaires.
Toutefois, même les Canadiens qui bénéficient d’une assurance dentaire privée se heurtent à des obstacles en raison des franchises élevées, de la participation aux coûts et des limites de couverture. Une couverture universelle pour un noyau limité de services dentaires essentiels devrait également être fournie.
La mise en œuvre du plan de garde d’enfants à 10 $ par jour du gouvernement fédéral a contribué à augmenter le taux d’activité des femmes ayant de jeunes enfants.
Toutefois, les engagements pris pour créer de nouvelles places sont loin de répondre à la demande dans l’ensemble du Canada. L’une des raisons est que les fournisseurs de services à but non lucratif ont du mal à accéder à des capitaux privés pour financer leur expansion, selon le chercheur Gordon Cleveland. La pénurie d’éducatrices de la petite enfance met également en péril la réussite du programme.
En outre, les 9 milliards $ alloués ne suffiront probablement pas à atteindre l’objectif de 10 $ par jour dans les provinces où les coûts sont élevés, comme la Colombie-Britannique, l’Alberta et l’Ontario. Un financement supplémentaire sera probablement nécessaire.
Entre-temps, la législation visant à mettre en œuvre la nouvelle prestation d’invalidité du Canada a reçu la sanction royale en juin, mais le gouvernement fédéral n’a pas encore élaboré les règlements nécessaires à sa mise en œuvre. Le Canada compte 6,2 millions de personnes handicapées. Près du quart d’entre elles (23 %) vivent dans la pauvreté, soit deux fois plus que les personnes non handicapées. Cette situation a été exacerbée par une inflation élevée.
Les défenseurs de la prestation l’ont qualifié d’« occasion unique de briser le lien entre le handicap et la pauvreté », tout en soulignant que le programme ne doit pas répéter les erreurs commises par les prestations et crédits d’impôt existants.
Les chercheuses Jennifer Robson et Lindsey M. Tedds soutiennent que les réglementations doivent tenir compte de l’intersectionnalité du genre, et de la nature et la gravité du handicap. Le processus doit inclure une participation substantielle de la communauté des personnes handicapées, et non une simple consultation.
Avec le logement, les prix des denrées alimentaires ont été au cœur des préoccupations liées au coût de la vie au cours des derniers mois. Dans le budget 2023, Ottawa a annoncé un remboursement unique pour les produits d’épicerie qui a fourni 2,5 milliards de dollars en allégement ciblé de l’inflation à 11 millions de Canadiens à revenu faible ou modeste. Le remboursement a été versé le 5 juillet avec le paiement trimestriel du crédit pour la TPS/TVH.
Toutefois, ce remboursement unique n’a pas suffi. Une analyse montre que le crédit pour la TPS était trop petit et qu’il n’a pas permis à de nombreuses personnes de dépasser le seuil de pauvreté.
Les efforts déployés par le gouvernement fédéral pour réduire les coûts et augmenter les revenus apporteront un soulagement nécessaire aux Canadiens à faible revenu et à d’autres populations vulnérables. Néanmoins, combattre l’inflation ne suffira pas, et d’autres mesures sont nécessaires.
Le gouvernement fédéral doit améliorer durablement les soutiens existants et nouveaux, et étendre des prestations ciblées aux personnes les plus vulnérables. Faire avancer la réforme de l’assurance-emploi et combler les lacunes dans les aides au revenu pour les Canadiens les plus modestes sont deux avenues où le gouvernement fédéral doit s’impliquer davantage dans le prochain budget.
Labour markets are in constant flux. As some sectors retract and shed jobs, others grow and search for workers. We’ve seen this play out over the past two years of the pandemic, as workers in the tourism and hospitality sector have been particularly hard hit by business closures while the healthcare sector has struggled to find workers.
The trend is expected to continue as Canada transitions to a low-carbon economy. TD Economics estimates that three-quarters of workers employed in Canada’s oil and gas sector are at risk of losing their jobs over the next 30 years. Yet many new jobs are expected to be created in clean-energy industries.
Helping workers find new employment options will be vital, and so will the availability of career guidance to help them make the transition. But there are few career-guidance options available for working-age adults in Canada. Research by the Labour Market Information Council shows that few Canadian adults access career services, far fewer than their counterparts in peer countries; many Canadians surveyed didn’t know these services even existed.
In a study published by the Institute for Research on Public Policy, we propose a new approach to career planning. Rather than relying on an individual’s degree or diploma or previous job title to look for employment alternatives, the method we employ identifies occupations — perhaps even in a different industry — that overlap with their current or recent job in terms of work activities and competences. This approach broadens the range of new employment options available for jobseekers and should result in a better job match. Our approach only considers alternative jobs in growing industries that offer wages at least as high as what workers earned in their previous occupation.
But identifying alternative careers isn’t enough. We can also pinpoint any skills gaps that would need to be addressed to make these transitions successful. This allows individuals and career counsellors to develop a roadmap to identify appropriate training programs that help jobseekers qualify for new jobs. Ideally, our proposed methodology would be used in conjunction with real-time data available on job-posting sites like ZipRecruiter or Indeed, as well as information on training options from tools that don’t yet exist but need to be developed.
We hear a lot about skills that workers will need to remain resilient in the face of labour market disruptions. In our view, a one-size-fits-all approach must give way to personalized career and training guidance tools that make the most of an individual’s skills, interests and abilities. Such tools will improve job matches, better target retraining efforts, and increase participation in and completion of training programs.
This type of comprehensive skills-based approach to career guidance would offer tailor-made employment and training solutions for unemployed workers, workers who seek to improve their employment options and those who are in danger of losing their jobs. These tools could be especially helpful for vulnerable populations, such as women and racialized Canadians whose jobs were most affected by the pandemic shutdowns.
When globalization and automation led to a widespread loss of jobs in North America’s manufacturing sector in the 1990s, many of the displaced workers took ill-suited jobs, resulting in lower pay and a loss of skills. Let’s avoid repeating mistakes of the past. Adopting a comprehensive skills-based approach to career guidance, like the one we propose, would be a step in the right direction. Our methodology remains in early stages of development and bringing it into widespread use will require substantial government investment. Given the scale of the problem, we can’t afford to put it off.
Matthias Oschinski is the founder and CEO of Belongnomics, and a member of the teaching faculty at the University of Toronto’s Munk School of Global Affairs and Public Policy.
Thanh Nguyen is an undergraduate student in computer science and engineering at MIT.
This op-ed was originally published by The Hill Times.
Amid the many uncertainties that this new year brings, we can make one prediction with confidence: In 2021 – and beyond – many Canadians will need some kind of training to ensure they have the skills needed to succeed in their current job or to find a new one.
However, as of today, Canada has no information system that would help workers in need of reskilling to find suitable education and training options that could provide sought-after skills.
The pressure to learn new skills has been building for some time and has been thrown into sharp relief. New technologies such as advanced robotics, blockchains, and augmented reality, are transforming the world of work, whether it’s running a warehouse, handling financial transactions, or constructing new buildings.
The coronavirus pandemic and accompanying economic crisis have only ramped up that pressure.
Working and learning from home have accelerated the advancement of these and other technologies that are now part of our daily lives – from learning to effectively facilitate conferences, workshops and team-building exercises using Zoom or TeamViewer, to schoolteachers and university professors designing courses that are delivered virtually.
At the same time, many workers who have lost their livelihoods due to the pandemic now face the daunting prospect of plunging into entirely new careers.
Effective training and skills programs will be central to helping these and other workers succeed in their current career path or to transition to entirely new ones. Such training can range from a half-day workshop on how to work collaboratively with a warehouse-organizing robot, or a five-year apprenticeship which integrates augmented reality tools and interfaces into the curriculum. But whatever shape it takes, these training programs will be successful only if Canadians can accurately identify the skills required for specific jobs, find the course or program that best teaches those skills, and have the ability and financial means to engage in that training.
For now, that is easier said than done. Despite the vast array of training options, it is difficult for Canadians to find answers to some basic questions: What training is available to me to learn how to do a particular task at work? Where can I learn the skills I need? Are online courses effective? Are there university or college programs available that provide the skills I need without a four-year commitment? Are training options in my home city or province as good as those in other parts of the country?
According to surveys by the Labour Market Information Council (LMIC), half of Canadian workers (25-54 years old) want more detailed information on the skills required for specific jobs. Indeed, except for salary/wage data, no other type of workplace information is more sought after than that pertaining to skills.
In a new paper for the Institute for Research on Public Policy, Mapping Canada’s Training Ecosystem: Much Needed and Long Overdue, we outline a blueprint for a comprehensive training information system that would link — or “map” — the skills sought by workers and employers to programs offered by universities, colleges and training specialists, as well as industry apprenticeship schemes.
The system mapping we propose would comprise three interlocking elements:
Such a comprehensive system would help individuals understand the skills requirements of various jobs and to find training that is best-suited to their needs and aspirations. Workers would benefit from improved job satisfaction and career planning. For employers, an efficient mapping system holds the promise of a substantial boost to productivity at a time when a serious skills shortage is looming. Manufacturers have recently cited a scarcity of skills as one of their top concerns after the pandemic-related disruptions, according to the LMIC.
Make no mistake, this is an ambitious and complex undertaking. According to Statistics Canada, there are more than 2,000 post-secondary and 64 vocational training institutions across the country. A complicating factor is that the provinces have jurisdiction over education, while labour market policy is a shared federal-provincial responsibility.
Further compounding the challenge is that system mapping must take into account the current shift taking place in most countries from training aimed at mainly providing credentials to training focused on the development and recognition of specific skills. Formal credentials, such as diplomas, degrees and certificates, are meant to signal that the holder possesses a certain set of skills and knowledge. Yet, as every employer knows, most give only a limited picture of an individual’s real abilities and potential.
We are confident that an efficient system mapping can overcome these obstacles, but only if some important conditions are met.
First and foremost is the need for close collaboration between employers, training providers and government agencies at all levels. Players with key roles in launching such a venture could include the Council of Ministers of Education, Canada (CMEC), Forum of Labour Market Ministers (FLMM), LMIC and the Future Skills Centre, among others.
We believe that a phased approach would be the best way of getting an effective, pan-Canadian mapping system off the ground. The first step would be a pilot project limited to two or three provinces or territories.
We envisage that the pilot would be implemented in stages, as follows:
Our paper is an urgent call to action. Without a trusted source of information that links training programs to skills, Canadians will have little choice but to muddle through by poking around online and relying on word-of-mouth advice. Some may end up wasting time, money and energy on unsuitable training programs. Many will not invest in training at all, hampering their ability to make a fresh start in their careers.
A successful mapping of Canada’s training programs to skills development stands to benefit not only workers and employers who gain most directly from smart training choices, but the entire Canadian economy. However, the challenge and scale of mapping Canada’s education and training systems to skills should not be underestimated. It is therefore essential to begin with a pilot project that can test and gather lessons learned to determine how best to move toward full implementation. We believe now is the time to test bold initiatives.
Imagine living on $10,000 per year in Toronto, searching for work while trying to stretch that $815 a month to cover housing, food, transportation and all other necessities. This is the reality for single people on social assistance.
To help them avoid falling into deep poverty – and the consequences that poverty has on their overall health – Ontario must increase the social assistance benefits that unemployed Ontarians who do not qualify for Employment Insurance often rely on. Single adults without dependants who are deemed employable receive about $8,800 in social assistance benefits annually, plus $980 in other tax credits and benefits (e.g., GST/HST tax credit). This income amounts to 40 per cent of Toronto’s poverty line. In other words, singles on social assistance can purchase only 40 per cent of the goods and services they need to achieve a basic standard of living.
These individuals live in deep poverty, a term reserved for those whose incomes amount to less than 75 per cent of the official poverty line, according to Statistics Canada. Just under half of the nearly 2 million Canadians living in deep poverty are working-age singles.
Poverty and health go hand in hand. Research indicates that individuals in poverty have a relatively low life expectancy and high suicide rates. They also are more likely to suffer from heart disease and mental health issues than most Canadians.
In October 2018, the federal government released Opportunity for All – Canada’s First Poverty Reduction Strategy, which set targets to reduce overall poverty rates. However, the risk in its approach is that overall poverty rates may decline without any improvements for those experiencing deep poverty. For example, families with children that once had incomes just below the poverty line could move above the line thanks to increases in the Canada Child Benefit, thereby lowering poverty rates. However, singles who remain below the poverty line – and do not qualify for child benefits – could see little improvement or fall further behind. Success should be defined by both the overall rate and the depth of poverty.
Ontario’s provincial poverty reduction strategy considers unattached individuals between the ages of 45 and 64 to be a vulnerable population. Yet the percentage of these individuals who are living in poverty increased from 32 to 36 per cent between 2012 and 2017, according to the last annual report on the status of the strategy. Ontario has work to do. Why not start by increasing benefits?
One reason policymakers tend to avoid increasing benefits is that they fear this will make paid work less attractive, a valid concern but only to a point. In a recent report for the Institute for Research on Public Policy, I investigated how increases to social assistance benefits over time increase the number of singles who take up social assistance across Canada. I found that a 10 per cent increase in benefits leads to just a two to five per cent increase in the number of singles who sign on. Although there is a link between benefits and caseloads, it is a weak one. Work provides dignity. It provides purpose and breaks the stigma of unemployment. These factors counteract, in large part, concerns that more generous benefits would drastically reduce the desire to work.
Singles are the household group most likely to face homelessness and to use food banks. Homelessness results in a wide range of health problems. And those who are homeless often face major barriers in accessing health care services.
A national study estimates that a $1,500 per year increase in social assistance benefits for an employable single without dependants would reduce the use of shelter beds on any given night by nearly 20 per cent. Also, research finds that overall rates of food security improved among social assistance recipients in British Columbia after a one-time increase in benefit levels in that province.
Singles on social assistance are more likely to report the negative effects of social isolation. Isolation often results in depression, poor sleep quality, accelerated cognitive decline, poor cardiovascular function and impaired immunity.
Less homelessness and improved food security would result in better overall health and less use of public health care, meaning cost savings to governments to partially offset the additional costs of increased benefits and a modestly higher number of people taking up social assistance. Further, better benefits could encourage more economic and social interactions, which would reduce the negative mental health effects from social isolation.
Reducing poverty can improve health. Although poverty reduction measures of recent decades have succeeded in boosting the incomes of seniors and low-income families with children, not enough has been done for singles on social assistance. To hit federal and provincial poverty reduction targets while mitigating the risks of deep poverty, Ontario must extend higher social assistance benefits to singles.
This article originally appeared in Healthy Debate.