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Diversité, immigration et intégration

Détérioration des salaires des nouveaux immigrants au Québec par rapport à  l'Ontario et à  la Colombie-Britannique

Brahim Boudarbat et Maude Boulet 7 novembre 2007

L’immigration est un phénomène qui gagne en importance depuis quelques années. Aussi importe-t-il au plus haut point que les immigrants soient en mesure d’accéder au marché du travail canadien et d’utiliser leurs compétences au profit de l’économie canadienne et pour leur propre bien-être. Or, la littérature économique canadienne a mis en évidence plusieurs problèmes auxquels font face les immigrants sur notre marché du travail.

En ce qui concerne la problématique salariale qui intéresse plus particulièrement les auteurs de cet article, deux résultats importants se dégagent : le salaire des immigrants à l’entrée sur le marché du travail est inférieur à celui des natifs canadiens, et ce salaire s’est détérioré au fil du temps. En fait, les immigrants récents obtiennent des salaires à l’entrée inférieurs à ceux de leurs prédécesseurs, ce qui pose un problème du fait que le niveau de qualification des nouveaux arrivants ne cesse de croître. Cependant – et bien que cette détérioration des salaires des nouveaux immigrants au Canada soit bien documentée –, il reste que nous ignorons comment cette détérioration se répercute au sein des provinces canadiennes. Par exemple, le Québec possède son propre ministère de l’Immigration et sa propre grille de sélection des immigrants, de sorte qu’il est pertinent de voir si ces mécanismes produisent des effets différents de ceux qu’engendrent les mécanismes fédéraux utilisés dans les autres provinces.

Dans cette étude, Brahim Boudarbat et Maude Boulet examinent l’évolution des salaires à l’entrée sur le marché du travail des nouveaux immigrants par province, en retenant les trois provinces canadiennes qui accueillent le plus d’immigrants, à savoir le Québec, l’Ontario et la Colombie-Britannique. Leurs analyses empiriques reposent sur les données d’un échantillon d’immigrants et d’immigrantes tiré des recensements de 1981, 1991 et 2001. Leurs résultats indiquent que la détérioration des salaires à l’entrée des récentes cohortes d’immigrants est relativement plus faible en Ontario, autant pour les hommes que pour les femmes. C’est en Colombie-Britannique que cette détérioration est la plus marquée chez les hommes, tandis que chez les femmes, c’est au Québec que la détérioration est la plus prononcée.

Les auteurs de cette étude constatent également que, dans ces trois provinces, l’expérience de travail étrangère est beaucoup moins valorisée que l’expérience canadienne, que les rendements des deux types d’expérience sont globalement comparables d’une province à l’autre, et que, dans toutes les provinces, les immigrantes ont plus de difficulté que leurs homologues masculins à transférer leurs acquis professionnels étrangers au marché du travail canadien.

Afin d’expliquer la détérioration des salaires des nouveaux immigrants par rapport à leurs prédécesseurs et les différences entre provinces, les auteurs utilisent trois des facteurs les plus relevés dans la littérature : les changements des sources d’immigration et les modifications des compétences linguistiques, les changements dans le rendement de l’expérience de travail acquise à l’étranger et l’impact du cycle économique. Ils montrent que pour les immigrants masculins, ces trois facteurs expliquent tout l’écart de salaires à l’entrée entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960 en Ontario, mais à peine un peu plus du tiers de l’écart au Québec et un peu plus du quart en Colombie-Britannique. Àl’opposé, pour les femmes immigrantes au Québec et en Ontario, ces facteurs n’ont eu qu’un faible impact sur l’écart de salaires entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960. Cependant, en Colombie-Britannique, cet écart aurait été deux fois plus important si ces changements n’avaient pas eu lieu. Par ailleurs, les auteurs constatent que, dans les trois provinces, le rendement de l’expérience sur le marché du travail canadien ne dépend pas de la région d’origine des immigrants. Pour ce qui est du rendement de l’expérience de travail à l’étranger, les immigrants masculins venus de régions qui constituent aujourd’hui de nouvelles sources d’immigration sont désavantagés dans les trois provinces à l’étude. Par contre, les femmes venues de pays d’immigration traditionnels comme les États-Unis et le Royaume-Uni ont autant de mal à transférer leur expérience de travail étrangère que celles qui sont originaires de pays d’immigration non traditionnels.

Bref, selon les auteurs de cette étude, la non-reconnaissance de l’expérience de travail à l’étranger constitue un obstacle de taille du point de vue de la politique publique, surtout lorsqu’on considère l’importance attachée à ce critère dans les grilles de sélection québécoise (quatrième critère sur six par ordre d’importance) et canadienne (troisième critère sur six). Ils soutiennent que, dans un souci de cohérence, les gouvernements québécois et canadien se doivent de mettre en place des mécanismes qui permettraient aux immigrants potentiels d’être bien informés du fonctionnement et de la réalité du marché du travail canadien, et aux immigrants sélectionnés de faire reconnaître leur expérience de travail étrangère. En raison de l’absence de tels mécanismes, les immigrants qui ont été sélectionnés, tout au moins en partie, précisément à cause de leur expérience professionnelle, doivent repartir à zéro sur le marché du travail canadien, ce qui apparaît incohérent.

Par ailleurs, pour contourner ce problème de la non-reconnaissance de l’expérience étrangère, Brahim Boudarbat et Maude Boulet recommandent de miser davantage sur les jeunes étudiants étrangers comme source d’immigration privilégiée. Ayant résidé au Canada pendant un certain temps, les étudiants étrangers ont en effet les connaissances de base nécessaires pour s’adapter à la vie canadienne, ont (ou auront) un diplôme canadien et, surtout, n’ont généralement pas d’expérience étrangère à faire reconnaître. Une telle politique aurait toutefois pour effet de réduire les chances de sélection des autres groupes d’immigrants potentiels, ce qui pourrait susciter un débat éthique sur la possible discrimination exercée en fonction de l’origine du diplôme ou de l’âge dans le cadre des politiques d’immigration. Il importe, en tout cas, que la société engage un débat public sur les vrais objectifs poursuivis dans le cadre des politiques d’immigration et sur les moyens d’en tirer le meilleur avantage possible.

Introduction

Le Canada compte parmi les pays d’accueil les plus importants au monde. Entre 1991 et 2000, il a admis 2,2 millions d’immigrants, soit le nombre le plus élevé de toutes les décennies depuis un siècle. De plus, en 2001, 18,4 % de la population totale du Canada était née à l’étranger, soit le taux le plus élevé au monde après l’Australie (22 %). Au Québec, ce taux s’établissait en 2001 à près de 10 %1, soit presque le même qu’aux États-Unis — 11 % (Statistique Canada 2003). Vu la tendance à la baisse des taux de fertilité et de la croissance de la population, le Canada va devoir compter davantage sur l’immigration pour sa croissance démographique et économique. En outre, le Canada est souvent considéré comme un exemple réussi de pays où les immigrants sont bien intégrés économiquement et socialement, en comparaison avec des pays comme la France, où les problèmes d’intégration sont devenus une source de tensions sociales graves. Àl’instar de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande, le Canada détermine l’admissibilité de certaines catégories d’immigrants à l’aide d’un système de points qui les sélectionne en fonction de leur aptitude à satisfaire aux exigences du marché du travail canadien relativement aux qualifications professionnelles. En fait, le Canada est un pionnier en matière de politique d’immigration.

La mise en place, en 1967, de la première grille de sélection du gouvernement fédéral représente un tournant important dans la politique d’immigration du Canada ; les critères liés aux préférences ethniques font alors place à des critères liés aux qualifications professionnelles, basés sur la théorie du capital humain, pour combler les nouveaux besoins économiques et politiques en immigration qui se manifestaient dans les sociétés industrielles après la Deuxième Guerre mondiale (Piché 2005). Bien que toutes les catégories d’immigrants ne soient pas soumises au système de points, certains auteurs considèrent qu’il s’agit là d’un excellent moyen pour contrôler la qualité des immigrants. Borjas, un auteur qui a réalisé des études influentes sur la question de l’immigration, a préconisé un tel système pour les États-Unis : « As Canada’s experience shows, the point system does a good job at screening the immigrant pool, and generates a more skilled immigrant flow than a system that does not use any skill filters » (Borjas 1999, p. 193). Par ailleurs, pour compenser la faible intégration et la performance des travailleurs peu qualifiés dans l’Union européenne, Constant et Zimmermann (2005) proposent un système de points pour la sélection des nouveaux immigrants qui met l’accent sur des motifs économiques, tout comme au Canada.

D’autre part, il convient de signaler que, si l’immigration au Canada est un champ de compétences partagées entre le gouvernement fédéral et les provinces (MRCI 2004), seul le Québec est très impliqué en cette matière, car il possède une grille de sélection distincte de celle qui est employée dans les autres provinces2. Le Québec souhaitant maîtriser son développement démographique, linguistique, social, économique et culturel, il s’est doté, en 1968, d’un ministère de l’Immigration. Robert (2005) souligne que la question de la préservation du français a joué un rôle important dans la prise de conscience collective voulant que le Québec s’implique dans le domaine de l’immigration. Le 1er avril 1991, l’Accord Canada-Québec relatif à l’immigration et à l’admission temporaire des aubins est entré en vigueur. Avant la signature de cet accord, c’est l’Entente Couture-Cullen de 1978 qui régissait le partage des compétences entre le Québec et le Canada en matière d’immigration. L’Entente Couture-Cullen permettait au Québec de sélectionner ses immigrants indépendants selon son propre système de points, qui diffère quelque peu de celui du gouvernement fédéral (Young 1991). La première grille de sélection du Québec a été introduite en 1979. De son côté, le nouvel accord de 1991 est venu ajouter des dispositions concernant les services d’accueil et d’intégration.

Les critères de sélection des immigrants du Québec ont évolué au cours des années en fonction des profils recherchés. Des modifications importantes ont été adoptées en 1996 de façon à mettre l’accent sur la sélection d’immigrants jeunes, fortement scolarisés, possédant une certaine expérience du marché du travail et une connaissance fonctionnelle du français (Parent et Worswick 2004). Au Canada, le système de points régissant la sélection des immigrants a aussi évolué au fil du temps3. En fait, depuis les modifications apportées en 1996, on a accru le nombre de points attribués à la scolarité et aux langues officielles, tandis que les critères liés à la profession ont été retirés. Àla suite de l’entrée en vigueur de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (2001), d’autres changements ont été apportés à la grille de sélection fédérale. En fait, la loi et les règlements afférents ont révisé le système de points en augmentant les points accordés à l’éducation (de 20 à 25 points), aux connaissances des langues officielles (de 20 à 24 points) et à l’expérience de travail (de 9 à 21 points), en supprimant les critères relatifs à une activité spécifique et en insistant sur l’adaptabilité personnelle des immigrants (OCDE 2003). Ces modifications témoignent de la prise de conscience de l’importance de l’éducation, de la connaissance des langues officielles et de l’expérience de travail pour favoriser une meilleure intégration des immigrants dans notre marché de l’emploi.

Comme dans toutes les sociétés d’accueil, l’intégration socioéconomique des immigrants revêt une grande importance pour le Canada. Des problèmes à ce niveau entraînent des coûts pour la société d’accueil — en raison, par exemple, du recours accru aux programmes de soutien du revenu et d’assistance sociale —, et peuvent susciter des tensions sociales. La performance économique des immigrants fait l’objet d’une littérature de plus en plus abondante au Canada. S’agissant de la mesure de cette performance, le salaire est l’indicateur le plus souvent utilisé dans la littérature économique. Depuis le début des années 1990, un grand nombre d’études ont été réalisées sous cet angle (Picot et Sweetman 2005 en présentent une synthèse). Ces études font état de la détérioration de la situation des immigrants récents sur le marché du travail au Canada et de l’augmentation du taux de faible revenu au sein de cette population. L’écart de gains moyens à l’entrée sur le marché du travail s’est élargi, d’une part, entre les natifs et les immigrants, et d’autre part, entre les immigrants installés au Canada pendant les années 1990 et ceux qui sont arrivés dans les années 1970 ou plus tôt. Par ailleurs, le taux de faible revenu a augmenté parmi les immigrants, notamment les immigrants récents, durant les années 1990, alors qu’il a baissé parmi les personnes nées au Canada pendant la même période (Picot et Sweetman 2005). Ainsi, Gray, Mills et Zandvakili (2003) constatent que la dispersion des revenus est beaucoup plus forte parmi les immigrants les plus récents que parmi les natifs canadiens, tandis qu’elle est comparable entre les premiers groupes d’immigrants et les natifs.

Les études empiriques montrent que trois facteurs principaux ont contribué à cette détérioration de la situation économique des immigrants. En premier lieu, la transformation qu’a connue la structure des régions d’origine des immigrants d’une cohorte à l’autre explique en partie cette détérioration économique. Aujourd’hui, la plupart des immigrants du Canada viennent d’Asie, tandis qu’au cours des six premières décennies du XXe siècle, ils venaient essentiellement d’Europe (Royaume-Uni, Italie, Allemagne et Pays-Bas, en particulier) et des États-Unis. Àtitre de comparaison, la part des immigrants originaires d’Asie dans l’immigration totale est passée de moins de 3 % avant 1961 à 33 % dans les années 1970, puis à 47 % dans les années 1980 et à 58 % entre 1991 et 2001 (Statistique Canada 2003). Aydemir et Skuterud (2005) ont obtenu des résultats qui révèlent qu’environ le tiers de la baisse des gains à l’arrivée des récentes cohortes d’immigrants au Canada est attribuable à l’effet conjugué des changements qui se sont produits du côté des aptitudes linguistiques et des régions d’origine. En outre, les immigrants des nouvelles régions d’origine ont des gains relatifs à l’entrée plus faibles que ceux des immigrants des régions dites traditionnelles, même lorsqu’ils ont des niveaux de scolarité et d’expérience comparables.

En deuxième lieu, la baisse du rendement de l’expérience de travail acquise à l’étranger a contribué à la détérioration de la situation économique des immigrants récents (Green et Worswick 2004 ; Frenette et Morissette 2003 ; Aydemir et Skuterud 2005). Green et Worswick (2004) ont constaté que la baisse du rendement explique 15 % de la diminution des gains à l’entrée sur le marché du travail des immigrants masculins arrivés entre 1993 et 1996 par rapport à ceux qui sont arrivés entre 1980 et 1982. On voit donc que le transfert de l’expérience étrangère est un problème important auquel sont confrontés les nouveaux immigrants, ce qui ne semble pas être le cas pour la scolarité étrangère. En effet, Aydemir et Skuterud (2005) ont constaté que les rendements de la scolarité acquise à l’étranger n’ont pas changé dans le temps et que, par conséquent, ces rendements ne sont pas un facteur déterminant dans la détérioration des revenus des nouveaux immigrants.

En troisième lieu, les variations de la conjoncture du marché du travail ont touché tous les nouveaux entrants sur le marché du travail canadien, qu’ils soient immigrants ou natifs. Green et Worswick (2004) ont montré que 36 % de l’écart de revenu à l’entrée entre la cohorte d’immigrants masculins de 1993-1996 et celle de 1980-1982 est attribuable à la baisse générale des revenus des nouveaux entrants (immigrants et natifs) sur le marché du travail. Aydemir et Skuterud (2005) en sont également venus à la conclusion que si les conditions du marché du travail n’avaient pas changé dans le temps, les immigrants de la deuxième moitié des années 1990 obtiendraient des revenus à l’entrée égaux ou supérieurs à ceux des immigrants des années 1960.

L’objectif de la présente étude n’est pas de revenir sur ces faits, qui sont bien documentés dans la littérature, mais d’examiner la baisse des salaires des immigrants à l’entrée sur le marché du travail (les « salaires d’entrée ») et les facteurs qui l’expliquent en comparant le Québec avec les autres provinces canadiennes à cet égard. En effet, malgré la richesse des travaux réalisés jusqu’à présent, leurs résultats s’appliquent au niveau national agrégé, ce qui ne nous renseigne pas quant aux écarts qui peuvent exister entre les provinces. En particulier, il serait intéressant de voir comment le Québec, qui se distingue par sa propre politique d’immigration et par l’importance de l’immigration francophone, se différencie des autres provinces en ce qui concerne la détérioration de la situation économique des nouveaux immigrants. Il n’y a pas, à notre connaissance, de travaux reposant sur des comparaisons de ce genre ou ayant examiné la détérioration de la situation économique des immigrants du Québec sur une période suffisamment longue au moyen de données portant sur différentes cohortes. Un certain nombre d’études importantes ont été consacrées à l’immigration au Québec, mais elles mettent plutôt l’accent sur les effets de la grille de sélection (Renaud et Cayn 2006 ; Parent et Worswick 2004), sur l’insertion en emploi (Godin 2004) ou sur les limites de l’accès à l’emploi (Renaud et Cayn 2006 ; Renaud 2005), en faisant appel à des données portant sur les immigrants relativement récents4. En ce qui a trait au revenu, Renaud, Piché et Godin (2003) ont constaté que l’origine nationale n’a un effet sur les écarts de revenu entre les immigrants qu’à court terme. Àlong terme, cet effet devient non significatif. Renaud et Cayn (2006) ont abouti à la même conclusion quant à l’effet des régions d’origine sur l’accès à un emploi correspondant aux qualifications de l’individu.

Notre étude a un double objectif. Elle vise d’abord à comparer l’évolution des salaires d’entrée des immigrants au Québec par rapport à l’Ontario et à la Colombie-Britannique. Ensemble, ces trois provinces ont accueilli 89,5 % des immigrants arrivés au Canada au cours des années 1990 (Statistique Canada 2003). Ensuite, notre analyse s’emploie à expliquer les changements observés à cet égard dans chacune des trois provinces en considérant notamment le rôle des trois facteurs relevés dans la littérature, à savoir la région d’origine et les compétences linguistiques, le rendement de l’expérience acquise à l’étranger et le cycle économique. Pour ce faire, nous exploiterons les données d’un échantillon de 105 669 immigrants dont 43 % sont des femmes, tirées des fichiers des recensements canadiens de 1981, 1991 et 2001. Pour alléger cette analyse, nous examinons quatre grandes cohortes d’immigrants selon l’année de leur arrivée au Canada, soit 1960-1969, 1970-1979, 1980-1989 et 1990-1999.

La suite de notre exposé se présente de la façon suivante. La deuxième section décrit les données utilisées et les variables analysées, tandis que la troisième fournit une analyse des principales statistiques descriptives de l’échantillon. Dans la quatrième section, nous expliquons les modèles économétriques utilisés ; les estimations qui en sont tirées étant examinées dans la cinquième section. Enfin, les principales conclusions de l’étude sont exposées dans la sixième section.

Données

Notre étude s’appuie sur les données que renferment les fichiers à grande diffusion des recensements du Canada5. Le recensement est une excellente source de données pour l’analyse de la situation des immigrants. Les données des cinq recensements quinquennaux réalisés entre 1981 et 2001 sont disponibles, ce qui permet de suivre l’évolution de leur situation sur deux décennies. Par ailleurs, le recensement fournit des échantillons de grande taille, ce qui permet d’estimer avec une grande précision les paramètres étudiés. Le recensement met également à notre disposition des données pertinentes sur les immigrants (année d’immigration, âge à l’immigration, région d’origine, etc.), mais il a l’inconvénient de ne pas distinguer entre les catégories d’immigrants (immigration économique, regroupement familial, réfugiés). Un autre avantage, non moins important, du recours à ces données tient au fait que les renseignements relatifs au statut d’immigrant (y compris l’année d’immigration et le pays d’origine), à la scolarité, aux salaires et à l’expérience de travail au cours de l’année précédant chaque recensement, ainsi qu’aux autres caractéristiques socioéconomiques des individus, ont été recueillis de la même façon entre 1981 et 2001. Cela permet d’effectuer des comparaisons intertemporelles. Il convient de rappeler que les données sur le salaire et les semaines travaillées concernent l’année précédant chaque recensement (par exemple, les données du recensement de 2001 se rapportent à l’année 2000).

Afin de limiter les variations dues aux fluctuations cycliques, comme le proposent Picot et Hou (2003), nous retenons uniquement les données des recensements de 1981, 1991 et 2001, car les années 1980, 1990 et 2000 (auxquelles se rapportent les données sur le salaire) correspondent aux sommets du cycle économique (cette concordance n’est qu’approximative dans le cas de 1990, puisqu’on considère habituellement 1989 comme étant l’année du sommet). Comme ces auteurs le soulignent, cela permet de séparer les effets de long terme des effets liés à la conjoncture économique. En outre, notre analyse cible les personnes âgées de 16 à 65 ans au moment de chaque recensement6. Par ailleurs, et à la différence de plusieurs autres études reposant sur les données relatives aux hommes seulement, nous incluons les deux sexes dans notre champ d’analyse, tout en effectuant des analyses distinctes selon le genre. Butcher et DiNardo (2002) font observer que la littérature existante sur la situation des immigrants exclut généralement les femmes. Les données sur les femmes ont le plus souvent servi à étudier la participation au marché du travail et la fertilité. Des études récentes ont redressé ce problème (par exemple, Butcher et DiNardo 2002 aux États-Unis, Aydemir et Skuterud 2005 au Canada). Enfin, rappelons que notre étude porte uniquement sur les résidants du Québec, de l’Ontario et de la Colombie-Britannique. Il y a une forte tendance des nouveaux immigrants au Canada à se concentrer dans ces trois provinces, une tendance qui s’est d’ailleurs accentuée au fil du temps. En effet, 81 % des immigrants arrivés au Canada au cours des années 1970 se sont établis dans ces trois provinces. Ce pourcentage est passé à 85 % parmi les immigrants arrivés au cours des années 1980, puis à près de 90 % parmi ceux admis durant les années 1990 (Statistique Canada 2003).

Signalons, par ailleurs, que, comme les données sur le salaire se rapportent à l’année précédant chaque recensement, notre échantillon ne comprend pas les immigrants arrivés au Canada au cours de l’année du recensement. C’est pourquoi, à chaque année de recensement, les immigrants les plus récents compris dans l’échantillon sont au pays depuis plus de six mois, de sorte qu’ils auront pu s’adapter au marché du travail canadien et surmonter le problème d’information imparfaite auquel font généralement face tous les nouveaux arrivants sur un marché du travail7.

Pour analyser la détérioration des salaires des immigrants au fil du temps, nous adoptons une approche par cohorte, chaque cohorte étant définie en fonction de l’année d’arrivée au pays. Étant donné l’écart temporel entre les fichiers de recensement utilisés (qui est de 10 ans dans notre cas) et afin d’assurer une bonne précision des résultats par province et par sexe, nous avons considéré de grandes cohortes correspondant chacune à un intervalle de 10 ans. Au total, nous avons retenu quatre cohortes d’immigrants arrivés entre 1961 et 20008.

Le recensement présente une contrainte en ce sens qu’il ne fournit ni le salaire horaire ni les données nécessaires pour le calculer. Il fournit néanmoins des renseignements sur le salaire annuel et sur le nombre de semaines travaillées par année, ce qui permet d’estimer le salaire hebdomadaire moyen pour les années 1980, 1990 et 2000. Plusieurs études consacrées aux salaires des immigrants s’appuient sur cette dernière variable. Pour pallier aux écarts relatifs à l’intensité du travail par semaine, certaines études se limitent aux individus qui ont travaillé à plein temps pendant une année complète, c’est-à-dire ceux qui ont déclaré avoir travaillé principalement à plein temps pendant 52 semaines au cours de l’année de référence (voir Aydemir et Skuterud 2005, par exemple). D’autres analyses faisant appel aux données du recensement incluent tous les travailleurs qui ont déclaré avoir travaillé surtout à plein temps pendant les semaines qu’ils ont rapportées, peu importe leur nombre (voir, par exemple, l’étude de Boudarbat, Lemieux et Riddell 2006, consacrée au rendement de la scolarité9). D’autres auteurs ont plutôt analysé le salaire horaire, jugeant que les estimations du salaire hebdomadaire confondent taux horaire et offre de travail. Dans ces études, on estime le salaire horaire en calculant le rapport entre le salaire annuel et le produit du nombre total de semaines travaillées (durant l’année qui précède le recensement) et du nombre d’heures travaillées pendant la semaine de référence de l’année du recensement (voir, par exemple, Smith et Stelcner 1988 et Worswick 1996). Cela permet d’examiner un échantillon de travailleurs plus vaste, mais l’estimation obtenue est entachée d’erreurs de mesure puisqu’il faut postuler que le nombre d’heures travaillées pendant la semaine de référence est le même pour chaque semaine travaillée durant l’année de référence. De plus, cette approche écarte tous les individus qui n’ont pas travaillé pendant la semaine de référence, mais qui ont travaillé durant l’année précédant le recensement.

Dans la présente étude, nous adoptons la deuxième approche, qui consiste à analyser le salaire hebdomadaire moyen des travailleurs ayant travaillé surtout à plein temps pendant les semaines rapportées pour l’année de référence, et ce, indépendamment du nombre de semaines travaillées. De plus, nous considérons uniquement les salaires et traitements annuels pour calculer le salaire hebdomadaire de ces travailleurs (nous ne tenons pas compte des revenus d’emplois autonomes). Notre approche, étant moins restrictive, permet de préserver un nombre beaucoup plus grand d’observations. En effet, dans notre échantillon global d’immigrants (les trois recensements regroupés), 90 % des hommes et 77 % des femmes qui avaient touché un salaire pendant l’année de référence avaient travaillé surtout à plein temps durant les semaines qu’ils ont rapportées pour cette année-là. Par contre, à peine 65 % des hommes et 52 % des femmes ont déclaré avoir travaillé surtout à plein temps à longueur d’année (c’est-à-dire pendant 52 semaines).

Pour chaque immigrant retenu, le salaire hebdomadaire est estimé en calculant le rapport entre le salaire annuel et le nombre total de semaines travaillées surtout à plein temps pendant l’année de référence. Ensuite, les estimations obtenues sont exprimées en dollars constants de 2000 en tenant compte de l’indice des prix propre à chacune des provinces. Cela permet de tenir compte des écarts entre les provinces quant à l’évolution du coût de la vie10.

Pour l’analyse des facteurs explicatifs de la détérioration des salaires des immigrants dans chaque province, nous considérons les facteurs habituels qui ressortent de la littérature comme ayant une influence déterminante sur la situation des immigrants. Comme on l’a mentionné plus haut, les transformations, d’une cohorte à l’autre, de la structure des pays d’origine des immigrants et de leurs aptitudes linguistiques, la baisse du rendement de l’expérience professionnelle étrangère et la conjoncture macroéconomique sont les principaux facteurs expliquant la détérioration des salaires des immigrants dans le temps. Nous verrons plus loin si ces facteurs expliquent de la même façon la situation des immigrants dans chacune des trois provinces étudiées.

Dans les fichiers à grande diffusion, les données sur les pays d’origine sont relativement limitées et les catégories changent d’un recensement à l’autre. Par exemple, en 1981, tous les pays d’Asie ont été regroupés en une seule catégorie, et il en va de même pour les pays africains. Ce n’est qu’à partir du recensement de 1986 que les données commencent à être plus détaillées. Pour l’Europe, la liste des pays et sous-catégories change également d’un recensement à l’autre, ce qui ne permet pas d’effectuer un suivi convenable. Par exemple, la France, source importante d’immigration au Québec, constitue une catégorie à part dans les recensements de 1981, 1986 et 2001, tandis qu’elle est regroupée avec d’autres pays dans les recensements de 1991 et de 1996. Compte tenu de ces contraintes, nous avons dû nous en tenir à huit catégories communes aux trois recensements utilisés : (1) États-Unis et Royaume-Uni, (2) Allemagne, Italie et Portugal, (3) ex-URSS et Pologne, (4) reste de l’Europe, (5) Asie, (6) Afrique, (7) Amériques (sauf États-Unis), (8) autres régions. Tout en admettant que cette façon de procéder comporte elle-même des contraintes, car il pourrait y avoir des divergences importantes entre les trajectoires de revenu des différentes composantes de chaque groupe, nous croyons que c’est néanmoins là le seul moyen qui permet d’analyser l’évolution de l’écart de salaires.

Comme l’indicateur de la connaissance des langues officielles du Canada ne constitue pas une bonne mesure des aptitudes linguistiques des immigrants, nous avons également considéré l’information sur leur langue maternelle.

Par ailleurs, comme le recensement ne recueille pas de données sur l’expérience de travail effective de l’immigrant, nous y avons substitué son expérience potentielle, calculée en soustrayant de son âge les six premières années de sa vie et ses années de scolarité. Àl’instar de Green et Worswick (2004) et d’Aydemir et Skuterud (2005), nous avons décomposé le nombre total d’années d’expérience en deux éléments, soit l’expérience canadienne et l’expérience acquise à l’étranger11.

Àla différence d’Aydemir et Skuterud (2005), nous n’avons pas fait de distinction entre la scolarité canadienne et la scolarité étrangère. Cette décomposition n’est pas directement disponible dans les fichiers et il faudrait adopter des hypothèses pour y procéder. De toute façon, ces deux auteurs sont arrivés à la conclusion que les rendements de la scolarité effectuée à l’étranger n’ont pas changé dans le temps et que, par conséquent, une telle décomposition ne joue pas un rôle déterminant dans l’explication de l’évolution des revenus des immigrants au Canada.

Pour ce qui est de la conjoncture du marché du travail, nous avons considéré le taux de chômage au moment de l’entrée de l’immigrant sur le marché du travail12. Certaines études ont montré que le cycle économique pourrait avoir des effets permanents sur la situation future des immigrants (voir Aydemir 2003, par exemple). En l’absence de données suffisantes sur le taux de chômage annuel par province pour la période précédant l’année 1976, nous avons considéré le taux de chômage pour l’ensemble du Canada comme indicateur de l’état de la situation du marché du travail pendant cette période13. Pour la période débutant en 1976, nous avons utilisé le taux de chômage annuel par province.

Nous avons également retenu le niveau de scolarité pour expliquer les salaires des immigrants. Nous avons fait appel aux données sur le grade, certificat ou diplôme le plus élevé obtenu par l’immigrant pour construire six catégories relatives à cette variable : (1) aucun grade, certificat ou diplôme, (2) certificat d’études secondaires, (3) certificat ou diplôme d’une école de métiers, (4) certificat ou diplôme collégial ou universitaire inférieur au baccalauréat, (5) baccalauréat, (6) études supérieures (grade universitaire postbaccalauréat).

Enfin, nous avons retenu à titre de variables de contrôle des indicateurs sur l’état matrimonial et sur la région métropolitaine de recensement14.

L’échantillon final comprend 105 669 observations, dont 43 % représentent des femmes. La ventilation par province se présente de la façon suivante : les deux tiers (66 %) des immigrants de l’échantillon global se trouvent en Ontario, 15 % sont au Québec et 19 % sont en Colombie-Britannique. Cette répartition est presque la même pour les deux sexes et correspond au poids de chaque province dans le total de l’immigration au Canada15. D’autres statistiques descriptives de l’échantillon global sont présentées au tableau 1 (voir l’annexe).

Analyse descriptive

Le tableau 2 de l’annexe montre l’évolution du logarithme du salaire hebdomadaire moyen (en dollars constant de 2000) des immigrants entre 1980 et 2000 selon la province et le sexe, toutes cohortes confondues. Les deux sexes ont connu des évolutions différentes dans le temps. La situation des femmes s’est nettement améliorée comparativement à celle des hommes, mais on constate des différences importantes entre les provinces. C’est en Ontario que la situation des femmes immigrantes s’est le plus améliorée, l’augmentation de leur salaire hebdomadaire moyen ayant atteint 20,4 % entre 1980 et 2000. En Colombie-Britannique, l’augmentation était de
8 %, tandis que le Québec enregistrait la hausse la plus faible, soit 4,7 % seulement. Parmi les immigrants masculins, le salaire hebdomadaire moyen a régressé au Québec et en Colombie-Britannique entre 1980 et 2000, ce recul étant plus important en Colombie-Britannique (11,6 % contre 7,3 % au Québec). Àl’opposé, la situation des immigrants de sexe masculin de l’Ontario s’est légèrement améliorée, leur salaire ayant augmenté de 1,3 % pendant cette même période.

Ces résultats indiquent que l’écart salarial entre les immigrants du Québec et ceux de l’Ontario s’est creusé davantage entre 1980 et 2000, passant de 0,5 à 16,3 % pour les femmes et de 10,3 à 18,9 % pour les hommes. Par rapport aux immigrants de la Colombie-Britannique, nous constatons une relative amélioration du salaire des immigrants masculins au Québec ; l’écart entre les deux provinces a baissé de 4 points, passant de 16,3 % en 1980 à 12,1 % en 2000. Pour les femmes immigrées, l’écart entre les deux provinces s’est élargi de 3,4 points, passant de 8,5 % en 1980 à 11,9 % en 2000. Soulignons toutefois que les écarts entre le Québec et l’Ontario n’ont que très peu changé entre 1990 et 2000, aussi bien pour les hommes que pour les femmes, ce qui revient à dire que les écarts entre les immigrants des deux provinces se sont accrus pendant les années 1980. La même constatation s’applique à l’écart entre le Québec et la Colombie-Britannique chez les hommes, alors que, chez les femmes, l’écart entre les deux provinces s’est creusé davantage pendant les années 1990.

Dans le tableau 2, nous présentons également des données se rapportant aux natifs canadiens. Cela permet d’apprécier l’évolution relative de la situation des deux groupes dans les trois provinces étudiées. Comme pour les immigrants, les écarts de salaire entre les natifs du Québec et ceux des deux autres provinces se sont élargis en 1990 et 2000, mais ces écarts sont généralement moins grands que ceux observés parmi les immigrants. S’agissant de l’écart salarial entre natifs et immigrants, deux faits importants sont à mentionner. Tout d’abord, dans les trois provinces, cet écart est positif en faveur des natifs et il s’est amplifié dans le temps pour les deux sexes, mais c’est en Ontario qu’il est relativement le moins grand (voir les quatre dernières lignes du tableau 2). Ensuite, l’écart salarial entre natifs et immigrants est assez semblable au Québec et en Colombie-Britannique, soit environ 3 % pour les femmes et 5 % pour les hommes en 1980, et environ 10 % pour les femmes et 12 % pour les hommes en 2000.

Ces comparaisons, tant interprovinciales qu’intertemporelles, restent superficielles, car elles ne tiennent pas compte des différences possibles entre les trois provinces quant aux caractéristiques des immigrants ni de l’évolution possible de ces caractéristiques dans le temps.

Le tableau 3 de l’annexe permet d’apprécier l’évolution des principales caractéristiques des nouveaux immigrants entre 1981 et 2001. Nous désignons par nouveaux immigrants ceux qui sont arrivés au Canada durant la décennie précédant chacune des années de référence. Ainsi, les données proviennent du recensement de 1981 pour la cohorte des immigrants arrivés entre 1971 et 1980, et du recensement de 2001 pour la cohorte des immigrants arrivés entre 1991 et 2000, et se rapportent uniquement (comme précédemment) aux immigrants salariés ayant travaillé surtout à plein temps.

Les données sur le salaire hebdomadaire en dollars constants donnent une idée de l’évolution de la situation des nouveaux immigrants (sans, toutefois, tenir compte de l’évolution de leurs caractéristiques). Cette situation s’est grandement détériorée surtout en Colombie-Britannique où le salaire hebdomadaire moyen des nouveaux immigrants (les deux sexes confondus) a baissé de 17 % entre 1980 et 2000. Au Québec, la baisse était de 8 %, donc moins forte qu’en Colombie-Britannique. En Ontario, la situation n’a pratiquement pas changé.

Ces comparaisons descriptives dissimulent d’importantes différences selon le sexe. Ainsi, dans les trois provinces, ce sont les nouveaux immigrants de sexe masculin qui sont les plus touchés par la détérioration de la conjoncture du marché du travail. Leur salaire hebdomadaire moyen a baissé de 25,3 % en Colombie-Britannique, de 11,4 % au Québec et de 7,5 % en Ontario. Pour les femmes, nous relevons un fait important qui est l’augmentation de 11,1 % de leur salaire hebdomadaire moyen en Ontario. Dans les deux autres provinces, le changement observé reste assez limité comparativement aux hommes, mais il est positif au Québec (+1 %) et négatif en ColombieBritannique (-1,9 %). Encore une fois, le Québec présente une situation intermédiaire entre l’Ontario et la Colombie-Britannique.

S’agissant des autres caractéristiques, nous relevons surtout une baisse du nombre d’années d’expérience au Canada en parallèle avec une augmentation du nombre d’années d’expérience à l’étranger. Cela s’expliquerait par la progression de l’âge moyen des nouveaux immigrants à leur arrivée au Canada. Par province, l’augmentation de l’expérience étrangère a été la plus faible au Québec, en raison probablement du fait que cette province attire des immigrants plus jeunes comparativement aux deux autres provinces. Au Québec, l’âge moyen à l’arrivée des immigrants considérés ici était de 30,1 ans pour la deuxième cohorte (c’est-à-dire les immigrants arrivés entre 1991 et 2000), soit un an de moins qu’en Ontario et un an et demi de moins qu’en ColombieBritannique. De plus, par rapport à la première cohorte (les immigrants arrivés entre 1971 et 1980), l’âge moyen à l’arrivée des nouveaux immigrants s’est accru de 3,1 années au Québec comparativement à 3,9 années en Ontario et 4,1 années en ColombieBritannique.

Nous constatons, par ailleurs, une amélioration importante du niveau scolaire des nouveaux immigrants dans les trois provinces : non seulement la proportion des immigrants sans diplôme a-t-elle diminué, mais on note également une augmentation de la proportion des immigrants munis de diplômes universitaires. En ce qui concerne la connaissance des langues officielles du Canada, nous relevons surtout l’augmentation de la proportion des nouveaux immigrants qui ne parlent ni l’anglais ni le français en Colombie-Britannique (1,8 point). Au Québec et en Ontario, les proportions correspondantes ont régressé de 2,2 et 2,8 points respectivement. De plus, nous constatons une forte augmentation (10,3 points) de la proportion des immigrants bilingues au Québec, qui reste la province où le pourcentage de nouveaux immigrants qui parlent au moins une langue officielle est le plus élevé. Cette progression s’est faite essentiellement au détriment des unilingues francophones (-2,9 points) et anglophones (-5,2 points). Enfin, la part des unilingues anglophones a augmenté de 3,4 points en Ontario au détriment des bilingues (-0,5 point) et de ceux qui ne parlent aucune des deux langues officielles (-2,8 points).

En ce qui a trait aux régions d’origine, le tableau 3 indique que le Québec continue de présenter une structure plus diversifiée à cet égard, tandis que l’Ontario et surtout la Colombie-Britannique se caractérisent par une prédominance croissante de l’immigration asiatique. Dans ces deux provinces, la proportion des nouveaux immigrants d’origine asiatique a fortement progressé entre 1981 et 2001, soit de 26,6 points en Ontario et de 29,2 points en Colombie-Britannique. Le Québec, où la proportion de ce groupe s’est accrue moins fortement (9,4 points de plus seulement), a attiré plus d’immigrants africains, dont la part est passée de 10,7 % à 18,3 % en 20 ans ; en outre, il affiche la proportion d’immigrants issus des Amériques (sauf ÉtatsUnis) la plus élevée, malgré une baisse de 7,4 points. Également, la région composée des autres pays d’Europe est davantage présente au Québec, probablement parce que la France est comprise dans cette catégorie.

Approche économétrique

Voici une façon simple de déterminer les salaires des immigrants à l’entrée sur le marché du travail :

où lnW est le log du salaire hebdomadaire, EXPc est le nombre d’années d’expérience acquise au Canada, EXPe est le nombre d’années d’expérience acquise dans le pays d’origine, NEj est une variable dichotomique représentant le niveau de scolarité j, Ck est une variable dichotomique qui réfère à la cohorte k, et u est une composante aléatoire qui représente les variables non observées. L’expérience (au Canada et à l’étranger) est exprimée en nombre d’années et introduite en suivant une forme quadratique. Cette forme permet de capturer l’évolution non linéaire des salaires avec l’expérience professionnelle. En effet, les salaires augmentent avec l’expérience, mais à un taux décroissant. Cela explique le signe négatif du terme quadratique « Expérience2 ». En contrôlant l’effet de l’expérience et de la scolarité, on peut interpréter le paramètre ak comme étant le salaire à l’entrée sur le marché de la cohorte k par rapport à la cohorte de référence (c’est-à-dire la première, ou encore la plus ancienne). La formulation (1) permet de comparer les rendements de l’expérience canadienne et étrangère et de tenir compte des différences entre les cohortes quant aux dotations de ces expériences. Comme l’expérience au Canada dépend du nombre d’années depuis l’immigration et que ce nombre est corrélé avec la cohorte, il est nécessaire de combiner au moins deux coupes transversales de données pour identifier le modèle décrit en (1).

Une faiblesse importante de la spécification (1) est qu’elle suppose que les rendements de l’expérience pour chaque type d’expérience sont constants pour toutes les cohortes. La spécification (2) est plus flexible, car elle relâche cette contrainte :

Dans cette étude, nous estimons une version encore plus souple du modèle (2) en tenant compte de la région d’origine et en permettant aux rendements des deux composantes de l’expérience de varier d’une région à l’autre et d’une cohorte à l’autre. De plus, nous tenons compte des aptitudes linguistiques, comme cela a été mentionné auparavant.

Enfin, à la différence de plusieurs autres travaux consacrés aux revenus des immigrants, nous considérons uniquement le groupe des immigrants pour estimer nos modèles. Par exemple, dans Aydemir et Skuterud (2005), bien que les immigrants et les nonimmigrants soient considérés ensemble, des coefficients propres à chaque groupe ont été estimés, ce qui revient à estimer les équations séparément. De plus, nous nous intéressons ici aux écarts de salaire entre les cohortes d’immigrants plutôt qu’aux écarts de salaire entre les immigrants et les natifs.

Résultats empiriques

Le tableau 1 de l’annexe présente les moyennes de l’échantillon (tous cohortes et recensements regroupés) pour les variables examinées, selon la province et le sexe. Il convient de signaler que ces statistiques ne reflètent pas le vrai portrait de l’immigration dans les trois provinces étudiées, et ce, pour deux raisons. D’une part, ces chiffres ne visent que les travailleurs qui ont touché un salaire en travaillant à plein temps pendant l’année de référence. Les travailleurs autonomes et les immigrants qui n’ont pas travaillé (y compris les enfants et les inactifs) ou qui n’ont travaillé qu’à temps partiel ne sont pas considérés. D’autre part, comme les données de trois recensements sont examinées ensemble, certaines cohortes se trouvent surreprésentées dans l’échantillon. Par exemple, les cohortes des immigrants dont l’arrivée remonte aux années 1960 et 1970 figurent trois fois dans l’enquête, tandis que celles qui ont été admises pendant les années 1980 y figurent deux fois et celles qui sont arrivées pendant les années 1990 n’y sont qu’une seule fois. Cela explique le poids de chaque cohorte dans l’échantillon total, comme on peut le voir au bas du tableau 1.

Distinction entre l’expérience canadienne et l’expérience étrangère

Les résultats de l’estimation du modèle (1) sont présentés au tableau 4 de l’annexe. Ces résultats confirment la détérioration des salaires des immigrants de chaque cohorte par rapport aux cohortes qui la précèdent. Dans les trois provinces, cette détérioration est plus prononcée chez les hommes que chez les femmes, ce qui est conforme à l’analyse descriptive exposée plus haut. Ces résultats confirment aussi ceux d’Aydemir et Skuterud (2005) sur le Canada et de Butcher et DiNardo (2002) sur les États-Unis. Une comparaison interprovinciale permet de constater que c’est en Colombie-Britannique que l’écart de salaires à l’entrée sur le marché du travail entre la cohorte d’immigrants masculins des années 1990 et celle des années 1960 est le plus marqué, soit 31,2 % ; cet écart est de 27,1 % au Québec et de 18 % seulement en Ontario. La différence entre le Québec et la ColombieBritannique à cet égard n’est toutefois pas statistiquement significative. Dans les trois provinces, les écarts obtenus sont statistiquement significatifs à 1 %. Par rapport à la cohorte des années 1970, l’écart de salaires des immigrants masculins de la cohorte des années 1990 reste toujours plus élevé en ColombieBritannique, soit 24,1 %, tandis que le Québec affiche une performance relativement plus favorable (16,4 %), mais moins bonne que celle de l’Ontario (12,6 %).

Du côté des immigrantes, la détérioration des salaires d’entrée entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960 est nettement plus sévère au Québec — écart de 15,4 % — qu’en ColombieBritannique (environ 10 %) ou en Ontario (6,8 %) ; les trois valeurs sont toutes statistiquement significatives à 1 %. Par contre, la comparaison des cohortes des années 1990 et 1970 montre que la détérioration des salaires, dans ce cas, est, statistiquement parlant, comparable dans les trois provinces : 7,2 % au Québec, 4,3 % en Ontario et 5,6 % en ColombieBritannique. Il faut souligner ici que lorsqu’on tient compte des variables liées à l’expérience (avec ses deux composantes canadienne et étrangère) et à la scolarité, les écarts obtenus diffèrent bien sûr de ceux qui découlent de l’analyse descriptive présentée précédemment, alors que les variations de ces variables n’étaient pas prises en compte.

Autre résultat important à signaler, l’écart de salaires à l’entrée entre les deux plus récentes cohortes d’immigrantes, soit les femmes arrivées pendant les années 1980 et 1990, est presque nul au Québec et en Colombie-Britannique, tandis qu’il est de 4,9 % en Ontario au désavantage de la cohorte des années 1990. Ainsi, la situation des immigrantes entre ces deux décennies est restée relativement stationnaire au Québec et en Colombie-Britannique, tandis qu’elle s’est dégradée en Ontario. Parmi les hommes, la détérioration entre ces mêmes décennies a été moins importante au Québec, où l’écart était de 5,2 %, comparativement à 8,4 % en Colombie-Britannique et 6,1 % en Ontario.

Bref, lorsqu’on considère uniquement l’évolution du salaire hebdomadaire à l’entrée sur le marché du travail au cours de la dernière décennie, on pourrait conclure que les immigrants établis au Québec s’en tirent relativement mieux que ceux des deux autres provinces en ce sens que la situation des immigrantes ne s’est pas détériorée (ce qui est également vrai pour les immigrantes de la Colombie-Britannique) et que la situation des immigrants masculins ne s’est pas dégradée autant que celle de leurs homologues de l’Ontario et de la Colombie-Britannique.

S’agissant des rendements de l’expérience et en supposant qu’ils sont les mêmes pour les quatre cohortes étudiées, nous constatons que, dans les trois provinces, les employeurs valorisent beaucoup plus l’expérience acquise au Canada que celle qui a été acquise à l’étranger, aussi bien chez les hommes que chez les femmes. L’expérience étrangère de ces dernières est d’ailleurs moins reconnue que celle des hommes dans les trois provinces ; en effet, ses coefficients sont généralement non significatifs statistiquement, ce qui n’est pas le cas pour les immigrants masculins, qui arrivent tout de même à tirer un avantage de cette expérience. Par ailleurs, les rendements des deux types d’expérience sont très comparables entre les trois provinces. Chez les immigrants masculins du Québec et en raison des rendements décroissants, le rendement de l’expérience acquise au Canada baisse de 3,7 % pour la première année d’expérience à 2,5 % pour la dixième année. Ces taux sont de 3,9 et 2,5 % en Ontario et de 3,5 et 2,2 % en Colombie-Britannique. Pour l’expérience étrangère, le rendement n’est que de 1,3 % pour la première année et 0,9 % pour la dixième année pour les immigrants masculins du Québec, de 1,2 et 0,6 % pour ceux de l’Ontario et de 1,4 et 0,7 % pour ceux de la Colombie-Britannique. Pour les femmes, le rendement de l’expérience canadienne n’est pas très différent de celui des hommes (3,1 % pour la première année et 2,0 % pour la dixième au Québec, 3,5 et 2,3 % en Ontario, et 3,6 et 2,3 % en Colombie-Britannique), mais les immigrantes sont désavantagées en ce qui concerne la reconnaissance de leur expérience étrangère, qui ne leur rapporte aucun bénéfice. De ce fait, l’écart de rendement entre l’expérience canadienne et l’expérience étrangère est plus important pour les femmes, ce qui concorde avec les résultats d’Aydemir et Skuterud (2005).

Pour ce qui est du rendement de la scolarité, nous constatons qu’il est généralement plus élevé au Québec à tous les niveaux d’études aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Le Québec se distingue surtout par le rendement plus élevé associé aux études postsecondaires (y compris universitaires). Par exemple, pour les immigrants masculins, un certificat ou diplôme collégial ou universitaire inférieur au baccalauréat a un rendement de 22,4 % par rapport à un certificat d’études secondaires et de 12,6 % par rapport à un certificat ou diplôme d’une école de métiers. Ces rendements sont de 16,7 et 5,0 % en Ontario, et de 13,7 et 4,7 % en Colombie-Britannique. La même constatation s’applique aux immigrantes qui, par ailleurs, bénéficient de rendements supérieurs à ceux des hommes à ce niveau dans les trois provinces.

En outre, le rendement d’un baccalauréat par rapport à un certificat d’études secondaires atteint 40,6 % pour les hommes et 43,6 % pour les femmes au Québec, contre respectivement 31,5 et 33,6 % en Ontario, et 24,9 et 29,5 % en Colombie-Britannique. Il s’avère donc qu’au Québec, la structure salariale des immigrants est marquée par des écarts plus importants entre les niveaux de scolarité que dans les autres provinces. Si cette structure semble favoriser les immigrants les plus scolarisés au Québec, elle entraîne, par contre, une plus grande dispersion des salaires des immigrants et une distribution plus inégale du revenu dans cette province.

Effets de la région d’origine, des différences liées aux rendements de l’expérience et de la connaissance des langues officielles

Dans le tableau 5 de l’annexe, nous présentons les résultats de l’estimation du modèle (2), y compris les effets des régions d’origine et des compétences linguistiques. Nous voulons surtout déterminer les effets qu’ont sur les salaires d’entrée les changements dans la structure des pays d’origine et (possiblement) dans les rendements des expériences canadienne et étrangère. En d’autres termes, nous cherchons à déterminer quelle aurait été l’évolution des salaires d’entrée si la structure des pays d’origine (et les compétences linguistiques) et les rendements des deux types d’expérience n’avaient pas changé dans le temps.

Nous constatons que l’évolution du rendement de l’expérience canadienne d’une cohorte à l’autre n’est pas statistiquement significative au Québec, aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Ce résultat signifie que les écarts de salaires entre les dernières cohortes et la première ne diminuent pas dans le temps. En Ontario, on observe une baisse, qui est statistiquement significative à 1 %, du rendement de l’expérience canadienne pour les hommes des cohortes des années 1970 (-0,5 %) et 1980 (-0,7 %) par rapport à la cohorte des années 1960. Cela indique que les écarts de salaires entre ces cohortes ont augmenté au cours des années. En Colombie-Britannique, il n’y a pas eu de changement statistiquement significatif pour les hommes, tandis que le rendement de l’expérience canadienne a augmenté pour les deux dernières cohortes de femmes immigrantes par rapport à la première (de 0,9 % par année pour la cohorte des années 1980 et de 1,7 % pour celle des années 1990). Ce dernier résultat présente une particularité en ce sens que les deux dernières cohortes d’immigrantes de la Colombie-Britannique sont les seules à avoir des salaires qui convergent vers ceux de la cohorte des années 1960.

Pour ce qui est du rendement de l’expérience étrangère, nous ne trouvons aucun indice de changement d’une cohorte à l’autre au Québec ou en Colombie-Britannique, tant pour les immigrants masculins que pour les immigrantes. Aucun des coefficients de l’interaction entre l’expérience étrangère et la cohorte n’est statistiquement différent de zéro dans ces deux provinces. L’Ontario est la seule province à afficher des changements à ce niveau, et ce, pour les deux sexes. Chez les femmes, nous relevons une augmentation du rendement de l’expérience étrangère pour les trois cohortes par rapport à celle des années 1960. Par exemple, une femme de la cohorte des années 1990 touche en moyenne 0,8 % de plus, par année d’expérience étrangère, qu’une femme de la cohorte des années 1960. Cet écart est statistiquement significatif au niveau 1 %. Des augmentations sont également constatées pour les immigrants masculins des cohortes 1970 (0,2 %) et 1980 (0,3 %), mais elles sont inférieures (en valeur absolue) aux baisses du rendement de l’expérience canadienne pour ces deux cohortes (respectivement -0,5 % et -0,7 %).

Les résultats qui nous intéressent le plus touchent aux pays d’origine des immigrants, étant donné la transformation qui s’est produite à cet égard au cours des trois dernières décennies. Outre l’effet constant de la région d’origine sur la moyenne des salaires, nos résultats montrent également que l’expérience, tant canadienne qu’étrangère, est valorisée dans chaque province en fonction du pays d’origine. C’est là une découverte importante par rapport à l’étude d’Aydemir et Skuterud (2005). Vu l’insuffisance des données sur les pays d’origine des immigrants européens, nous concentrons notre analyse sur les résultats relatifs à l’Asie, à l’Afrique et aux Amériques. Premièrement, en ce qui a trait à l’effet constant, nous observons que la région d’origine influence moins les salaires des femmes immigrantes que ceux de leurs homologues masculins. En fait, la région d’origine n’a aucun effet statistiquement significatif sur le salaire d’entrée des immigrantes au Québec, tandis que dans les deux autres provinces, l’origine Amériques est affectée d’un coefficient négatif en Ontario (-5,6 %) et l’origine Allemagne/Italie/Portugal est affectée d’un coefficient positif en Colombie-Britannique (15,1 %) ; ces coefficients sont statistiquement significatifs à 5 %. Il faut aussi signaler la bonne performance des femmes asiatiques (+6,9 %) et africaines (+10,3 %) par rapport au groupe de référence (immigrantes originaires des États-Unis et du Royaume-Uni) en ColombieBritannique ; ces écarts ne sont, toutefois, significatifs qu’à 10 %. Bref, à part le coefficient négatif de la région Amériques en Ontario, nos résultats n’indiquent aucune discrimination automatique envers les femmes originaires des nouvelles sources d’immigration, à savoir l’Afrique, l’Asie et les Amériques, et ce, dans chacune des trois provinces.

Or, il en va autrement pour les immigrants masculins. En effet, toutes choses égales par ailleurs, les immigrants masculins venus d’Afrique et des Amériques sont très défavorisés au Québec et en Ontario par rapport au groupe de référence (immigrants masculins originaires des États-Unis et du Royaume-Uni). Dans le cas des immigrants africains, les écarts par rapport au groupe de référence se situent respectivement à -14,7 % au Québec et à -14,8 % en Ontario. Pour les hommes en provenance des Amériques, ils se chiffrent à -14,7 % au Québec et à -12,6 % en Ontario. Aussi, les écarts sont-ils comparables dans les deux provinces, mais ceux du Québec peuvent susciter des préoccupations du fait que l’Afrique et les Amériques y occupent une place plus importante parmi les sources d’immigration récentes que dans les deux autres provinces, comme le montre le tableau 3. Les immigrants venus d’Asie sont défavorisés en Ontario (-8,3 %) et en ColombieBritannique (-6,2 %) par rapport au groupe de référence. Rappelons que, pour la cohorte des années 1990 (hommes et femmes), environ 6 immigrants sur 10 en Ontario et environ 8 sur 10 en ColombieBritannique étaient d’origine asiatique. C’est donc dire que les écarts salariaux observés dans ces deux provinces s’appliquent à un très grand nombre de nouveaux immigrants. En revanche, on constate qu’au Québec les immigrants masculins d’origine asiatique s’en tirent beaucoup mieux que ceux qui sont originaires d’Afrique ou des Amériques (sauf États-Unis) ; bien qu’il soit négatif, le coefficient de la région Asie n’est pas statistiquement significatif pour le Québec. Au-delà des niveaux de signification, il importe également de souligner que les coefficients des trois régions (Afrique, Amériques et Asie) au Québec et en Ontario sont très rapprochés.

Voyons maintenant comment les employeurs valorisent l’expérience des immigrants selon leur région d’origine. De façon générale, nos résultats indiquent que les employeurs ne font pas preuve de discrimination lorsqu’il s’agit de reconnaître l’expérience canadienne et ce, aussi bien pour les femmes que pour les hommes dans les trois provinces. Dans le cas des hommes d’origine africaine, nous relevons, toutefois, un rendement légèrement supérieur de cette expérience au Québec (0,7 % de plus par année) et en Ontario (0,6 % de plus), ce qui leur permet de compenser l’effet négatif constant de leur région d’origine. Dans le cas des femmes, deux coefficients seulement sont statistiquement significatifs, soit celui du groupe Allemagne/Italie/Portugal au Québec (qui s’établit à -0,9 % par année d’expérience au Canada, mais s’applique à un groupe marginal en termes numériques, du moins pour les immigrants des années 1990) et celui du groupe ex-URSS/Pologne en Ontario (+0,7 % par année d’expérience au Canada).

L’examen des rendements de l’expérience étrangère selon la région d’origine rend compte des difficultés qu’ont les immigrants à transférer leurs acquis professionnels au moment d’entrer sur le marché du travail canadien. Cela est particulièrement le cas des immigrants masculins établis au Québec et en Ontario. Dans ces deux provinces, ce sont surtout les immigrants asiatiques qui sont les plus concernés par la dévalorisation de l’expérience étrangère (-1,9 et -1,3 % par année d’expérience étrangère respectivement au Québec et en Ontario), suivis des immigrants venus d’Afrique (-1,4 % au Québec et -1,1 % en Ontario). C’est le cas également des immigrants originaires des Amériques, de l’ancienne URSS et de la Pologne ainsi que du reste de l’Europe (-1,2 % au Québec et entre 0,6 et 0,9 % en Ontario pour chaque année d’expérience acquise à l’étranger). En Colombie-Britannique, les hommes asiatiques (groupe fortement dominant dans la structure des pays d’origine dans cette province) obtiennent -0,7 % par année d’expérience. C’est le cas également des hommes africains qui, toutefois, ne représentent qu’une faible part de l’immigration en ColombieBritannique. Les coefficients des autres régions d’origine ne sont pas statistiquement significatifs. En somme, comparativement au groupe de référence, c’est au Québec que la non-reconnaissance de l’expérience étrangère des immigrants de sexe masculin est la plus marquée.

La situation des immigrantes est relativement différente de celle des immigrants masculins. La différenciation du rendement de l’expérience étrangère selon la région d’origine est en effet moins évidente dans leur cas. Au Québec, seules les femmes asiatiques reçoivent un rendement inférieur pour leur expérience étrangère (-0,8 % par année par rapport au groupe de référence). Ce groupe est par ailleurs pénalisé en Ontario (-0,6 %) et en Colombie-Britannique (-1,1 % par année d’expérience étrangère). Les immigrantes originaires de l’exURSS et de la Pologne ont également de la difficulté à faire valoir leur expérience étrangère dans ces deux provinces (respectivement -0,5 et -1,0 % par rapport au groupe de référence). En résumé, c’est au Québec que les immigrantes rencontrent le moins de discrimination relativement aux régions d’origine lorsqu’il s’agit de faire reconnaître l’expérience étrangère. C’est exactement le contraire qui se passe pour les immigrants masculins.

Naturellement, l’évolution de la structure des pays d’origine des immigrants d’une cohorte à l’autre se répercute sur les capacités linguistiques des nouveaux arrivants. Un certain nombre d’entre eux ne parlent aucune des deux langues officielles, et on trouve des écarts importants quant au niveau de la maîtrise linguistique de ceux qui indiquent en parler au moins une16. Malheureusement, les données du recensement n’offrent aucune mesure de la maîtrise des langues à part l’indication sur la langue maternelle qui est comprise dans nos régressions. Comme on pouvait s’y attendre, nos résultats indiquent que les immigrants masculins qui ne parlent aucune langue officielle reçoivent en moyenne un salaire inférieur, soit près de 15 % de moins que les bilingues au Québec et en Ontario, et 17,4 % de moins en Colombie-Britannique. Les bilingues ont également un avantage salarial non négligeable par rapport aux unilingues au Québec et en Ontario, mais ce n’est pas le cas en Colombie-Britannique. Même au Québec, le fait d’être unilingue (français ou anglais) entraîne une baisse de salaire de 4,7 % (français seulement) à 5,6 % (anglais seulement) par rapport à un homme bilingue.

Parmi les immigrantes, on constate surtout que, toutes choses égales par ailleurs, l’écart salarial entre les bilingues et celles qui ne parlent aucune langue officielle n’est pas statistiquement significatif en Colombie-Britannique, ce qui est a priori surprenant ; le coefficient de « français seulement » est significatif à 10 %, mais se rapporte à moins de 1 % de l’échantillon des femmes dans cette province (voir le tableau 1). Toutefois, dans la même province et toutes choses égales par ailleurs, celles qui ne parlent aucune langue officielle gagnent en moyenne 6,9 % de moins que celles qui parlent l’anglais seulement ; cet écart est significatif à 5 %. Dans les deux autres provinces, la connaissance des langues officielles joue un rôle plus important du point de vue des salaires versés aux femmes. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, les femmes bilingues qui résident en Ontario touchent en moyenne 19,4 % de plus en salaire que les femmes qui ne parlent aucune langue officielle, et 10,4 % de plus que celles qui parlent l’anglais seulement. Au Québec, ces rendements sont équivalents aux deux tiers de ceux de l’Ontario, mais il est intéressant de noter que les coefficients de « anglais seulement » et « français seulement » ne sont pas statistiquement différents, autant pour les hommes que pour les femmes. Cela revient à dire que l’écart salarial moyen entre les bilingues et les unilingues ne dépend pas de la langue officielle parlée par les unilingues. Sans ces résultats, nous aurions imaginé plutôt un avantage en faveur des unilingues francophones par rapport aux unilingues anglophones au Québec.

Enfin, il n’y a aucun effet significatif de la langue maternelle sur les salaires des immigrants, hommes et femmes, en Colombie-Britannique. De plus, le fait d’avoir le français comme langue maternelle n’est avantageux qu’au Québec. Comme la langue maternelle est liée au pays d’origine, les coefficients rattachés à cette langue pourraient également renfermer les effets des régions d’immigration dites traditionnelles (par exemple, la France pour le français, le Royaume-Uni et les États-Unis pour l’anglais). Au Québec, le fait d’avoir le français comme langue maternelle augmente le salaire en moyenne de 7,1 % chez les immigrants masculins et de 12,0 % chez les immigrantes. Par ailleurs, le fait d’avoir l’anglais comme langue maternelle procure un avantage salarial d’environ 7 % pour les immigrants masculins, aussi bien au Québec qu’en Ontario. Il n’y a pas d’avantage statistiquement significatif à ce niveau pour les immigrantes de ces deux provinces. Lorsqu’on considère tous ces résultats ensemble, on peut conclure qu’au Québec et en Ontario, ce sont surtout les immigrants unilingues (francophone ou anglophones) dont la langue maternelle ne correspond à aucune langue officielle qui sont les plus défavorisés — après ceux qui ne parlent aucune langue officielle, bien sûr.

Comme on l’a vu précédemment, les estimations relatives au niveau de scolarité indiquent que les rendements de la scolarité postsecondaire sont toujours plus élevés pour les immigrants des deux sexes au Québec.

Lorsque nous tenons compte des effets de l’évolution des rendements des deux types d’expérience et de ceux de la région d’origine et des aptitudes linguistiques des cohortes, nous obtenons des résultats qui varient selon la province et selon le sexe en ce qui a trait aux écarts salariaux à l’entrée sur le marché du travail. Le tableau 6 permet de comparer les écarts entre les cohortes d’immigrants avant et après cet exercice de contrôle (première et deuxième colonnes pour chaque province).

Plus particulièrement, nous constatons que, chez les immigrants masculins, l’écart salarial à l’entrée sur le marché du travail qui, avant l’exercice de contrôle, était défavorable à la cohorte des années 1970 par rapport à celle des années 1960, devient (après le contrôle) statistiquement non significatif au Québec et en Colombie-Britannique, et positif et hautement significatif en Ontario. Ainsi, en Ontario, les immigrants masculins appartenant à la cohorte des années 1970 auraient obtenu un salaire d’entrée supérieur de 5,5 %, en moyenne, à celui de leurs homologues des années 1960 si les régions d’origine, la connaissance des langues officielles et les rendements de l’expérience étaient restés les mêmes. Toujours en Ontario, les écarts de salaire observés entre les cohortes des années 1980 et 1990, d’une part, et celle des années 1960, de l’autre (-11,9 et -18,0 % respectivement), disparaissent lorsqu’on tient compte des effets des variables précitées ; ces écarts deviennent même positifs en faveur des cohortes les plus récentes, bien qu’ils ne soient pas statistiquement significatifs. Pour les femmes immigrées en Ontario, les écarts de salaire entre les cohortes des années 1970 et des années 1980, d’une part, et celle des années 1960, d’autre part, deviennent non significatifs. De même, l’écart de salaire entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960 est ramené de -6,8 % (significatif à 1 %) à -5,9 % (significatif à 10 % seulement).

Au Québec, l’écart salarial à l’entrée sur le marché du travail entre la cohorte des années 1970 et celle des années 1960 devient non significatif, aussi bien pour les hommes que pour les femmes, comme on l’a mentionné plus haut, et les écarts entre les cohortes des années 1980 et 1990 et celle des années 1960 sont réduits d’environ 13 et 10 points de pourcentage respectivement (soit 58 et 36 % des écarts initiaux) chez les immigrants masculins, ce qui est substantiel. Du côté des immigrantes, les écarts salariaux subsistent à des niveaux non loin de ceux observés précédemment pour les cohortes des années 1980 et 1990. Il convient tout de même de signaler la baisse de 3,1 points de pourcentage de l’écart salarial entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960. Cela n’est pas surprenant dans la mesure où les résultats ci-dessus indiquent, entre autres, que la rémunération des femmes au Québec dépend peu de la région d’origine. Donc, même si la structure des pays d’origine n’avait pas changé au Québec, la situation des immigrantes n’aurait pas été significativement différente de celle qu’on observe aujourd’hui.

Enfin, en Colombie-Britannique, les écarts de salaire entre les cohortes masculines des années 1980 et 1990 et celle des années 1960 ont baissé respectivement de 5,9 et 8,2 points de pourcentage, soit 26,3 et 25,9 % des écarts initiaux. Parmi les immigrantes de la même province, la prise en compte de la transformation de la structure des pays d’origine et des différences relatives aux rendements de l’expérience d’une région d’origine et d’une cohorte à l’autre entraîne une accentuation des écarts de salaires entre les deux dernières cohortes (années 1980 et 1990) et la première (années 1960). C’est la seule province où nous avons relevé un changement de cette nature. En effet, l’écart de salaires à l’entrée sur le marché du travail a presque doublé entre les femmes de la cohorte des années 1990 et celles de la cohorte des années 1960. C’est dire que l’évolution des rendements de l’expérience des immigrants et de la structure de l’immigration en ColombieBritannique d’une décennie à l’autre a eu des effets plutôt bénéfiques pour les immigrantes de cette province ; leur situation se serait davantage détériorée si ces changements n’avaient pas eu lieu17.

Effet du cycle économique

Afin d’examiner l’effet du cycle économique sur les salaires, nous avons refait les estimations du tableau 5 en intégrant le taux de chômage au Canada au moment de l’entrée sur le marché du travail parmi les variables explicatives. Les données sur le taux de chômage national indiquent des variations importantes entre 1961 et 2000, période sur laquelle porte notre étude. Ce taux était de 7,1 % en 1961, mais il a chuté à 3,6 % en 1966. Il a ensuite suivi une tendance à la hausse pour atteindre 12,3 % en 1983, avant de baisser à 7,4 % en 1988 et 1989. Par la suite, le taux de chômage a de nouveau augmenté jusqu’à 12,1 % en 1992 avant de retomber à 7 % en 2000. Ainsi, les immigrants ont dû faire face à des conditions macroéconomiques très différentes selon l’année de leur entrée sur le marché du travail. Le tableau 6 montre les écarts de salaires à l’entrée entre les cohortes d’immigrants, lesquels ont été estimés en tenant compte de ces conditions en plus de l’évolution des rendements de l’expérience et de la structure des régions d’origine (troisième colonne pour chaque province).

En comparant ces résultats avec ceux de la deuxième colonne (contrôle 1, tableau 6), nous constatons que le taux de chômage au moment de l’entrée sur le marché du travail n’a pas d’impact significatif sur les écarts de salaire à l’entrée entre les cohortes d’immigrants de sexe masculin dans les trois provinces. Cela est tout particulièrement vrai au Québec et en Colombie-Britannique. De plus, les estimations des coefficients des autres variables restent presque inchangées18.

Pour les immigrantes, l’effet du cycle économique sur les salaires d’entrée varie d’une province à l’autre, mais il est généralement assez faible, notamment au Québec et en Ontario. Au Québec, les écarts de salaires d’entrée entre les cohortes des années 1980 et 1990 et celle des années 1960 ont baissé d’un peu plus de 1 point de pourcentage. En Ontario, tous les écarts par rapport à la cohorte des années 1960 sont à présent statistiquement non significatifs, de sorte que nous avons pu expliquer tous les écarts de salaires entre les cohortes dans cette province. Enfin, en Colombie-Britannique, le cycle économique a un impact relativement plus important sur les salaires des femmes ; les écarts de salaires entre les cohortes féminines des années 1980 et 1990 et celle des années 1960 ont baissé respectivement de 4,4 et 3,9 points de pourcentage. L’écart de salaire devient -11,8 % pour la cohorte des années 1980 et -14,7 % pour la cohorte 1990 par rapport à celle des années 1960. Ainsi, l’amélioration de la situation des femmes dans cette province qui s’est produite grâce à la transformation de la structure de l’immigration a été atténuée par l’évolution macroéconomique négative à laquelle ont dû faire face les cohortes plus récentes.

En résumé, il ressort de ces résultats que le Québec se présente comme une province intermédiaire entre, d’une part, l’Ontario, où nous parvenons à expliquer entièrement les écarts de salaires d’entrée entre les cohortes masculines et féminines plus récentes et la première cohorte, et, d’autre part, la ColombieBritannique, où la part inexpliquée de ces écarts est plus élevée qu’au Québec et ce, pour les deux sexes.

Conclusion

Les résultats de cette étude montrent que les salaires des immigrants à l’entrée sur le marché du travail canadien se sont détériorés, mais présentent des différences importantes selon le sexe et selon la province. Dans les trois provinces étudiées, la dégradation est plus prononcée parmi les immigrants masculins que parmi les cohortes féminines. Au niveau provincial, c’est l’Ontario qui présente le bilan relativement le plus positif, tandis que le Québec affiche une performance relativement plus favorable que la Colombie-Britannique.

L’écart de salaires à l’entrée sur le marché du travail entre la cohorte masculine des années 1990 et celle des années 1960 est de 31,2 % en ColombieBritannique, de 27,1 % au Québec et de 18 % seulement en Ontario en faveur de la cohorte de 1960. Chez les immigrantes, cet écart est le plus élevé au Québec avec 15,4 % contre environ 10 % en Colombie-Britannique et seulement 6,8 % en Ontario. Cependant, en comparant la cohorte des années 1990 avec celle des années 1980, l’écart salarial est presque nul pour les immigrantes du Québec et de la Colombie-Britannique, alors qu’il est de 4,9 % pour celles de l’Ontario, au désavantage de la cohorte des années 1990. Chez les immigrants masculins, l’écart salarial entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1980 a été le moins élevé au Québec avec 5,2 %, contre 8,4 % en Colombie-Britannique et 6,1 % en Ontario, au désavantage de la cohorte la plus récente. Ainsi, au cours de la dernière décennie, le Québec semble s’être comporté relativement mieux que les deux autres provinces à cet égard.

Les résultats relatifs à la faible détérioration des salaires des femmes comparativement à ceux des hommes sont peut-être reliés au fait que les femmes participent de plus en plus au marché du travail et que leur salaire est de moins en moins considéré comme un salaire d’appoint. De 1960 à 2000, les droits des femmes au travail ont marqué des progrès importants, notamment en matière d’équité salariale. Nous estimons que les immigrantes ont pu bénéficier de ces progrès et que c’est ce qui explique, tout au moins en partie, la différence entre les femmes et les hommes en ce qui a trait à la détérioration des salaires pendant la période de référence.

Pour les immigrants masculins, la transformation de la structure des régions d’origine et l’évolution des rendements des expériences canadienne et étrangère d’une cohorte à l’autre expliquent tout l’écart salarial entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960 en Ontario, mais à peine un peu plus du tiers (36 %) de l’écart estimé pour le Québec et un peu plus du quart (25,9 %) de l’écart calculé pour la ColombieBritannique. Pour les immigrantes, ces transformations expliquent une très faible part de l’écart salarial en Ontario (qui est toutefois relativement faible déjà) et à peine 20 % au Québec. Par ailleurs, en ColombieBritannique nos résultats indiquent que l’écart salarial entre la cohorte féminine des années 1990 et celle des années 1960 aurait été deux fois plus élevé si ces changements n’avaient pas eu lieu. Ce dernier résultat vient contredire ceux qu’on trouve dans la littérature existante.

Nous croyons également que le taux de chômage au moment de l’entrée sur le marché du travail n’a pas d’impact significatif sur les écarts de salaires d’entrée entre les cohortes d’immigrants de sexe masculin et ce, dans les trois provinces. Pour les immigrantes, l’écart salarial (résiduel) en Ontario entre la cohorte des années 1990 et celle des années 1960 devient non significatif statistiquement lorsque le cycle économique est pris en compte. Au Québec, cet écart baisse de 1 point de pourcentage seulement contre 3,9 points en Colombie-Britannique, où la situation des immigrantes est relativement plus sensible au cycle économique.

Toutefois, nous avons constaté que les deux dernières cohortes d’immigrantes de la ColombieBritannique étaient les seules à afficher un rendement de l’expérience professionnelle canadienne supérieur à celui de la cohorte des années 1960. Ce résultat indique que l’écart salarial entre ces deux cohortes et celle de 1960 se rétrécit au fil des années.

D’autres résultats mettent en évidence des différences importantes entre les trois provinces et les deux sexes. Par exemple, c’est au Québec que le niveau de scolarité procure le meilleur rendement aux immigrants. En d’autres termes, les écarts de salaires entre les niveaux de scolarité sont plus importants au Québec que dans les deux autres provinces. Ce résultat est encourageant si l’on considère les efforts du ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC) qui, depuis 1971, a créé un service d’équivalence d’études afin d’apporter une solution concrète aux immigrants se dirigeant directement vers le marché du travail (MICC 2005a). Depuis lors, les immigrants formés à l’étranger peuvent obtenir un document intitulé « Évaluation comparative des études effectuées hors du Québec » qui précise à quoi correspondent leurs études par rapport au système scolaire québécois. De plus, depuis les années 1990, des projets consacrés à la reconnaissance des acquis et à la formation d’appoint ont été mis en œuvre (MICC 2005a). Il convient toutefois de souligner qu’une structure salariale marquée par des écarts plus importants entre les niveaux de scolarité au Québec se traduirait par une dispersion accrue des salaires des immigrants et une distribution plus inégale du revenu que dans les autres provinces.

Dans un autre ordre d’idées, nos résultats indiquent que le salaire des femmes était généralement moins sensible aux régions d’origine que celui des hommes et ce, surtout au Québec. Cela invite à penser que les immigrantes des régions d’immigration non traditionnelles (Asie, Amériques et Afrique) sont moins exposées que leurs homologues masculins à la discrimination salariale par rapport aux immigrants originaires des États-Unis ou du Royaume-Uni, dans les trois provinces canadiennes. Nous croyons que la situation plus favorable des immigrantes du Québec par rapport à celles des deux autres provinces pourrait s’expliquer par le fait que le groupe ÉtatsUnis/Royaume-Uni est typiquement anglophone. Ce groupe de référence doit avoir de meilleurs résultats salariaux dans une province d’accueil qui partage la même langue que dans une province francophone. Par contre, cette explication ne tient pas dans le cas des immigrants de sexe masculin. En effet, les immigrants masculins originaires d’Afrique et des Amériques font l’objet de discrimination salariale au Québec et en Ontario. Ils obtiennent des salaires d’entrée sensiblement moins élevés que les immigrants du groupe de référence. Par contre, il n’y a pas de discrimination salariale à l’endroit des immigrants asiatiques au Québec, contrairement à ce qu’on peut observer en Ontario et en Colombie-Britannique.

En ce qui a trait au rendement de l’expérience de travail, nos résultats montrent que l’expérience professionnelle canadienne est davantage reconnue que l’expérience étrangère dans les trois provinces, autant pour les hommes que pour les femmes. Par ailleurs, l’évolution de la structure des régions d’origine n’a pas eu d’effet perceptible sur la valorisation de l’expérience canadienne acquise par les immigrants. En ce qui concerne la reconnaissance de l’expérience étrangère, les femmes éprouvent plus de difficulté que les hommes à faire reconnaître leurs acquis étrangers, ce qui implique que celles qui décident de quitter leur pays pour immigrer dans une de ces trois provinces doivent être prêtes à repartir à zéro. Toutefois, les immigrants de sexe masculin venant des nouvelles régions d’origine, en particulier de l’Asie, sont également aux prises avec des difficultés de ce genre, notamment au Québec et en Ontario. C’est au Québec que l’expérience de travail étrangère est la moins valorisée. Parmi les immigrantes de cette province, seules les Asiatiques reçoivent un rendement inférieur pour leur expérience étrangère comparativement au groupe de référence ; l’écart est toutefois plus que deux fois inférieur à celui relevé pour les hommes asiatiques dans cette province (-0,8 % pour les femmes contre -1,9 % pour les hommes). Àprime abord, nous ne savons pas à quels facteurs attribuer ce phénomène. C’est pourquoi nous recommandons que d’autres recherches soient consacrées à cette problématique afin d’élucider les différences entre les hommes et les femmes du point de vue de la reconnaissance de l’expérience étrangère.

Nous avons fait remarquer que la question de la langue constitue un enjeu particulier pour le Québec. Cette question a notamment joué un rôle dans la décision voulant que le Québec adopte sa propre politique d’immigration afin de favoriser la préservation de la langue française. Aussi s’attendrait-on à ce que l’aptitude linguistique ait des répercussions non négligeables au Québec. Nos résultats montrent d’ailleurs que le fait d’avoir le français comme langue maternelle contribue à faire augmenter le salaire des immigrants au Québec, tout particulièrement celui des immigrantes. Dans les autres provinces, la langue maternelle semble être un enjeu moins important, car tous les résultats sont non significatifs, à l’exception de la langue maternelle anglaise en Ontario. Nos résultats indiquent néanmoins que la connaissance des deux langues officielles est payante pour les immigrants et immigrantes du Québec et de l’Ontario. Cependant, nous constations que, toutes choses égales par ailleurs, l’écart salarial à l’entrée entre une femme bilingue et une femme qui parle une seule langue officielle (ou aucune) est plus important en Ontario qu’au Québec.

Enfin, nous estimons que, du point de vue des politiques publiques, le problème de la reconnaissance du capital humain acquis à l’étranger (qui inclut l’expérience professionnelle et les diplômes obtenus à l’étranger) constitue le plus grand défi que doivent relever les responsables canadiens et québécois de l’immigration. Nos résultats montrent cependant que la question de la reconnaissance de l’expérience professionnelle étrangère est un défi plus préoccupant que celle de la reconnaissance de la scolarité acquise à l’extérieur du Canada. Puisqu’il existe déjà des institutions chargées de la reconnaissance des diplômes étrangers au Canada, nous recommandons que les responsables des politiques publiques mettent au point des mécanismes semblables pour favoriser l’utilisation et la reconnaissance de l’expérience professionnelle étrangère et recrutent plus d’immigrants parmi les étudiants étrangers nouvellement diplômés des établissements postsecondaires canadiens.

L’expérience étrangère

Les autorités de l’immigration attachent une grande importance à l’expérience professionnelle des immigrants au moment de leur sélection. En fait, Citoyenneté et Immigration Canada accorde 21 points à l’expérience de travail, ce qui en fait le troisième critère sur six par ordre d’importance (CIC 2007). Au Québec, 10 points sont accordés à l’expérience de travail, ce qui place ce critère au quatrième rang sur six par ordre d’importance (MICC 2005b). Or, nos résultats montrent que la reconnaissance de l’expérience étrangère ne va pas de pair avec l’importance qui lui est accordée dans la sélection des immigrants. Il y a là un sérieux problème de cohérence entre le discours des gouvernements qui veulent attirer des immigrants qualifiés sur leur marché du travail et la réalité à laquelle ces immigrants sont confrontés lorsque les employeurs refusent de reconnaître leurs qualifications professionnelles. Il est essentiel d’instaurer une telle cohérence si nous voulons que les immigrants admis au pays vivent une expérience de travail positive. Du reste, les immigrants ne seront pas les seuls à bénéficier de cette cohérence plus étroite entre les exigences des politiques d’immigration et la réalité du marché du travail. La province qui les accueille en bénéficiera aussi, car plus leurs qualifications seront facilement actualisables dans la région d’accueil, plus ils pourront contribuer à son développement économique et social. Bref, il faudrait mettre en place des moyens permettant aux immigrants de transférer au Canada le capital humain acquis dans leur pays d’origine. Le transfert des compétences des immigrants revêt une grande importance pour une économie où les organisations considèrent les connaissances comme leur ressource la plus précieuse et la plus stratégique (Zack 1999). Il serait donc avantageux pour les employeurs d’utiliser et de reconnaître de façon juste les compétences que les immigrants ont acquises sur le marché du travail de leur pays d’origine.

Il peut arriver que, pour diverses raisons, les immigrants aient de la difficulté à transférer au Canada les compétences de travail qu’ils ont acquises à l’étranger. Pour parer à cette difficulté, le Québec, par exemple, a mis en place des programmes de formation d’appoint spécialement conçus à l’intention des immigrants exerçant certaines professions déterminées (par exemple, ingénieurs et infirmières) dans le but de combler leurs lacunes culturelles et professionnelles (Roux 2003). Les taux de succès de ces programmes sont excellents, mais le nombre de places disponibles est très limité (18 places par an pour un programme s’adressant aux infirmières) et leur survie dépend toujours du maintien du financement accordé par Emploi-Québec. Ces mesures semblent d’ailleurs largement insuffisantes par rapport au nombre d’immigrants admis chaque année au Québec, dont plus de la moitié appartiennent à la catégorie des travailleurs qualifiés. Nous croyons que ce genre d’initiative pourrait favoriser le transfert des compétences (acquises en milieu scolaire et en milieu de travail) des immigrants au marché du travail canadien, mais il faudrait sûrement rendre ces programmes accessibles à un plus grand nombre d’entre eux.

Les étudiants étrangers nouvellement diplômés

Le problème de la transférabilité limitée du capital humain d’un pays à l’autre pénalise davantage les immigrants qui possèdent une expérience de travail déjà bien établie. Les immigrants plus jeunes ont toutefois moins à perdre que leurs aînés à cet égard. C’est pourquoi, pour atténuer les effets du manque de reconnaissance de l’expérience étrangère (surtout pour les femmes), nous recommandons une autre solution, qui pourrait très bien être conjuguée aux programmes d’insertion culturelle et professionnelle mentionnés ci-haut. Nous croyons en effet que les services gouvernementaux chargés de la sélection des immigrants devraient privilégier l’admission d’individus très jeunes. Cette suggestion se justifie par le fait que l’expérience étrangère est plus difficilement reconnue que l’expérience canadienne sur le marché du travail des trois provinces considérées dans notre étude. En admettant un plus grand nombre de jeunes immigrants qui possèdent peu d’expérience de travail dans leur pays d’origine, le Canada permettrait à ces jeunes d’acquérir et d’accumuler beaucoup plus d’expérience canadienne. Cela favoriserait l’utilisation de tout le potentiel des immigrants en termes de capital humain, ce qui ne pourra qu’avoir un impact positif sur l’économie de la province d’accueil et sur le bienêtre des immigrants eux-mêmes.

Pour attirer des candidats jeunes et qualifiés, les autorités de l’immigration devraient se tourner vers les étudiants étrangers nouvellement diplômés des établissements postsecondaires canadiens. Ces jeunes sont des candidats de choix pour notre société : ils possèdent les connaissances nécessaires pour fonctionner dans notre pays, puisqu’ils y résident depuis déjà quelques années. Le Conseil supérieur de l’éducation (2005) affirme d’ailleurs que les étudiants étrangers constituent une catégorie de choix au regard des objectifs des politiques d’immigration canadienne et québécoise. Toutefois, comme ces jeunes n’ont probablement pas encore d’expérience professionnelle dans leur domaine, ils ne devraient pas être pénalisés par la grille de sélection actuelle qui, rappelons-le, attache une importance non négligeable à l’expérience de travail des immigrants. C’est pourquoi nous suggérons d’accorder des points pour le lieu d’obtention du diplôme afin de compenser cette lacune. Enfin, il faudra adopter des mesures parallèles pour éviter que les jeunes n’abusent de ce système en cherchant à obtenir des diplômes dans le seul but d’immigrer au Canada. L’expérience australienne pourrait servir de modèle à cet égard19. Avant de mettre en place de telles mesures, il faudra toutefois tenir compte du fait qu’une politique de ce genre introduirait un biais de sélection favorisant les jeunes immigrants aux dépens des immigrants plus âgés. Si, du point de vue strictement économique, cette recommandation semble très bénéfique, il faudra néanmoins considérer les enjeux que soulèverait, du point de vue de l’éthique, une politique de sélection reposant sur la discrimination en fonction de l’âge.

Les auteurs voudraient remercier Reynald Bourque et Jean-Michel Cousineau, de l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, Claude Montmarquette, du Département de sciences économiques de l’Université de Montréal, ainsi que deux évaluateurs anonymes, pour leurs commentaires et suggestions hautement appréciés. Les auteurs tiennent également à remercier Geneviève Bouchard de l’IRPP pour sa lecture attentive et ses conseils et suggestions pertinents.

  1. C’était la plus forte proportion de personnes nées à l’étranger enregistrée par le Québec depuis un siècle (Statistique Canada 2003).
  2. Il convient de préciser que certaines autres provinces sont également de plus en plus impliquées dans le domaine de l’immigration. Par exemple, le Programme des candidats des provinces permet aux provinces visées de choisir et nommer des immigrants qui souhaitent éventuellement s’établir dans ces provinces et acquérir le statut de résidants permanents du Canada. Chaque province choisit les candidats à même de répondre aux besoins des employeurs auxquels les citoyens et les résidants permanents du Canada ne peuvent pas satisfaire. Les provinces nomment également des entrepreneurs sous ce programme. Les individus nommés par les provinces, ainsi que leurs dépendants, peuvent par la suite solliciter un visa de résidant permanent auprès de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) à titre de « candidats de la province ». CIC accorde la priorité aux demandes de résidence permanente provenant de ces personnes nommées. La décision finale relativement à ces demandes revient à CIC.
  3. Green et Green (2004) présentent une synthèse de l’évolution de ce système entre 1967 et 1996. Ces auteurs ont illustré les différents changements apportés à la grille de sélection canadienne et ont attiré l’attention sur les modifications récentes (jusqu’à 1996).
  4. Les données de deux enquêtes ont particulièrement été exploitées dans le cadre des recherches sur la situation des immigrants au Québec. Il s’agit de l’Enquête longitudinale sur l’établissement des nouveaux immigrants (ENI), qui a suivi pendant 10 ans un échantillon de 1 000 immigrants arrivés au Québec en 1989, et de l’Enquête sur les travailleurs sélectionnés (ETS), réalisée en mars 2002 auprès d’un échantillon de 1 875 immigrants de la catégorie travailleurs, admis au Québec entre janvier 1997 et juin 2000.
  5. Statistique Canada offre des fichiers à grande diffusion constitués d’échantillons aléatoires représentant de 10 à 15 % (selon les années) des individus qui ont répondu au « questionnaire long ». Ces échantillons représentent de 2 à 3 % de la population recensée, alors que les fichiers complets représentent 20 % de la population.
  6. Comme les données sur le salaire et les semaines travaillées concernent l’année précédant chaque recensement, ces personnes étaient âgées de 15 à 64 ans pendant cette période.
  7. L’étude de Renaud et Cayn (2006) sur les immigrants sélectionnés du Québec montre que le taux d’accès de ces immigrants à un emploi correspondant à leurs qualifications était le plus élevé pendant les six premiers mois après leur arrivée ; un an après l’arrivée, le taux d’accès diminue considérablement : 50 % des immigrants ont accédé à un emploi qualifié après un peu plus d’un an suivant leur arrivée ; quatre ans plus tard, le taux n’était que de 67,8 %.
  8. Voir Aydemir et Skuterud (2005) pour une analyse portant sur des cohortes de cinq ans. Les résultats de cette étude indiquent que les écarts de salaires entre deux cohortes d’une même décennie sont généralement plus petits que les écarts salariaux entre deux cohortes de décennies différentes. Cela conforte notre approche basée sur des cohortes de 10 ans. De plus, en adoptant un intervalle de 10 ans, les problèmes d’adaptation et de transition associés aux premières années d’immigration devraient être relativement moins importants pour la dernière cohorte analysée (1991-2000), puisqu’une bonne partie de cette cohorte est au Canada depuis plus de cinq ans.
  9. La même approche a été adoptée par Card et Lemieux (2001) et dans plusieurs études américaines comme celle de Katz and Murphy (1992).
  10. Les différences sont toutefois très minimes à ce niveau. En effet, en 2000, un dollar de 1980 valait 0,467 $ au Québec, 0,452 $ en Ontario et 0,472 $ en ColombieBritannique. De même, la valeur d’un dollar de 1990 était en 2000 de 0,827 $ au Québec, 0,828 $ en Ontario et 0,816 $ en Colombie-Britannique.
  11. La décomposition n’est qu’approximative du fait qu’elle considère le nombre d’années depuis l’immigration.
  12. Green et Worswick (2004) et Aydemir et Skuterud (2005) ont procédé de la même façon.
  13. Cela aura peu d’impact sur les résultats puisque, pour la période allant de 1976 à 2004, nous constatons que les taux de chômage annuels dans les trois provinces étudiées évoluent dans le même sens que le taux national. Aussi, lorsque le taux de chômage national est élevé, il l’est également dans chacune des trois provinces.
  14. Àl’instar des travaux existants sur les revenus des immigrants, nos régressions n’incluent pas de variables dichotomiques pour les années du recensement.
  15. Sur l’ensemble des immigrants arrivés dans les trois provinces au cours des années 1990, l’Ontario en a accueilli 63 %, le Québec 15 % et la ColombieBritannique 22 % (Statistique Canada 2003).
  16. Par exemple, la proportion de nouveaux immigrants qui parlent une langue non officielle à la maison est passée de 56 % en 1991 parmi les immigrants des années 1980 à 61 % en 2001 parmi ceux des années 1990. De plus, environ un immigrant sur dix arrivé dans les années 1990 n’a aucune connaissance de l’anglais ou du français (Statistique Canada 2003).
  17. Comme nos régressions comprennent plusieurs termes d’interaction — entre les deux types d’expérience (canadienne et étrangère), d’une part, et les cohortes et régions d’origine d’autre part —, il nous a paru utile d’évaluer le pouvoir explicatif de ces termes par rapport à la région d’origine considérée indépendamment. Pour ce faire, nous avons refait les régressions précédentes sans ces termes d’interaction. Les résultats diffèrent selon le sexe et la province. Globalement, les termes d’interaction précités ont un effet très important sur les écarts de salaires chez les femmes de la Colombie-Britannique, mais n’ont qu’un effet minime parmi les hommes de la même province et parmi les femmes du Québec. Bref, l’effet constant de la région d’origine est dominant pour la plupart des groupes d’immigrants considérés dans cette étude.
  18. On peut obtenir les résultats de ces régressions en s’adressant aux auteurs.
  19. En Australie, les étudiants étrangers qui finissent leurs cours dans les collèges professionnels et les universités sont automatiquement autorisés à solliciter un visa général de travailleur qualifié (general skilled migration visa), une étape qui mène à l’octroi du statut de résidant permanent.

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Tableau 1 Moyennes des variables de lechantillon analyse selon le sexe et la province2

Tableau 2 Evolution du logarithme du salaire hebdomadaire moyen selon la province et le sexe2

Tableau 3 Evolution de certaines caracteristiques des nouveaux immigrants salaries ayant travaille surtout a plein temps selon la province1

Tableau 4 Estimations de lequation de salaire des immigrants selon le sexe et la province1 modele 1

Tableau 5 Estimations de lequation de salaire des immigrants selon le sexe et la province1 modele 2

Tableau 5 Estimations de lequation de salaire des immigrants selon le sexe et la province1 modele 2 suite

Tableau 6 Ecarts de log de salaire entre la cohorte 1961 1970 et les cohortes subsequentes selon la province et le sexe

 

 

 

 

Brahim Boudarbat est professeur adjoint d’économie à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal. Avant d’occuper son poste actuel, Brahim était chercheur post-doctoral et chargé de cours au Département de sciences économiques à l’Université de la Colombie- Britannique (UBC). En 2004, il a obtenu un doctorat en sciences économiques de l’Université de Montréal. Ses recherches portent sur l’intégration économique des immigrants, l’investissement en capital humain et le chômage des jeunes.

Maude Boulet est doctorante en relations industrielles à l’Université de Montréal. Elle a obtenu un baccalauréat en psychologie, puis a complété sa scolarité de maîtrise en relations industrielles à cette même université. Ses recherches dans le cadre de sa thèse de doctorat portent sur l’intégration des immigrants au marché du travail québécois et canadien. Maude étudie, entre autres, l’évolution de l’accès à l’emploi, des conditions d’emploi et des salaires chez les nouveaux immigrants au Québec par rapport aux autres provinces canadiennes.

Ce document a été produit sous la direction de Geneviève Bouchard, directrice de recherche à l’IRPP. La révision linguistique a été effectuée par Michel Forand et la correction d’épreuves par Félice Schaefli. La mise en page a été réalisée par Chantal Létourneau et la direction artistique a été confiée à Schumacher Design. Imprimé par AGL Graphiques.

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Pour citer ce document :

Boudarbat, Brahim, et Maude Boulet. 2007. « Détérioration des salaires des nouveaux immigrants au Québec par rapport à l’Ontario et à la Colombie-Britannique ». IRPP Choix 13, no 7. Montréal : Institut de recherche en politiques publiques.